[Live Report] Tindersticks et Osin Leech à la Salle Pleyel : Pour la beauté

Evènement parisien de la semaine, Tindersticks investissent Pleyel. Une fois encore, ils vont y démontrer la profondeur de leur musique et de leur répertoire, et prouver que leur dernier opus Soft Tissue est un album taillé pour la scène.

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Tindersticks à la Salle Pleyel – Photo Laurence Buisson

Depuis 5 ans et la sortie de No Treasure but hope, Tindersticks semblent avoir élargi leur public. Plus de 30 ans après la sortie de leur insurpassable premier album, ils font désormais partie des valeurs sures, comme en témoigne ce nouveau passage à Pleyel complet depuis plusieurs semaines. Le groupe alterne albums expérimentaux et plus classiques, mais leur qualité est constante. Distractions en 2022 avait laissé quelques fans sur la route, et c’est fort d’un Soft tissue mémorable et gorgé de soul que Stuart Staples et sa bande investissent la salle du Faubourg St Honoré dont l’acoustique parfaite est à même de faire honneur à la subtilité de leur musique.

 

Oisin Leech Photo Laurence Buisson
Oisin Leech à la Salle Pleyel – Photo Laurence Buisson

Comme la première partie est assurée par l’irlandais Oisin Leech, auteur de Cold Sea l’un des plus beaux albums folks de 2024, nous nous dirigeons vers Pleyel avec la quasi-assurance de passer une bonne soirée. C’est à 19h45 qu’Osin Leech arrive sur scène dans une salle quasi vide (il était annoncé à 20h, ceci pouvant expliquer cela). Son set va donc se dérouler en même temps que le ballet des ouvreuses et des spectateurs qui s’installent bruyamment, ce qui n’est pas l’idéal compte tenu de son style de musique. Ceux qui ont fait l’effort d’être là vont être récompensés.

Accompagné d’un contre bassiste, il va se concentrer principalement sur les chansons de Cold Sea, en démarrant par One hill further. La voix est assurée, le son excellent. Osin est sympa, échange avec le maigre public en parlant de ses apparitions précédentes à Paris en première partie de M Ward au Point Ephémère. Le concert continue avec Empire et October Sun et les meilleures chansons des disques Malin Gales et Colour of the Rain sont de la partie également. On l’a un peu comparé à Nick Drake, mais ce qui frappe plutôt, c’est une proximité musicale forte avec Bill Callahan, un Bill Callahan qui serait né en Irlande et non dans le Maryland, et qui chanterait son île et ses côtes balayées par les vents et la pluie. Vers la fin du set, Osin Leech nous gratifie d’un nouveau morceau, toujours inspiré de son Irlande natale. Tremone Bay est superbe, et donne immédiatement une envie de tourisme, d’aller sur ce point nord de l’Irlande, de boire un verre dans l’un de ses pubs en écoutant Osin Leech dans son habitat naturel avant de prendre la bateau pour Islay.

 

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Tindersticks à la Salle Pleyel – Photo : Laurence Buisson

A 20 h40, Stuart Staples et son combo rentrent sur scène accompagnés par le désormais traditionnel orchestre à cordes, et leur set démarre par How He Entered, l’un des moments phares de The Waiting Room, leur album de 2016. Composée par le bassiste Dan Mc Kenna, cette chanson subtile permet de constater que le son est excellent, mais que ce n’est peut-être pas la meilleure manière de commencer un concert.

On est en droit de préférer A Night So Still et Trees Fall. Avec ces deux extraits de The Something Rain et No Treasure but Hope, nous voici avertis : nous allons assister à une soirée rétrospective. Le public est sage, la sauce ne prend pas encore. Et ce n’est pas avec le premier extrait de Soft Tissue que nous allons nous réveiller. Falling, the Light est peut-être le seul titre un peu faible de l’album, l’ennui guette, mais heureusement pas pour longtemps, le groove accompagnant Nancy commence à produire ses effets.

Tindersticks Photo Laurence Buisson 02C’est à ce moment que Tindersticks se lancent dans deux morceaux de Distractions, la reprise de Dory Previn Lady with the Braid (très bien reçue par une salle Pleyel qui se réveille), et le fabuleux The Rough Bands, entrecoupés par une version de Willow sur fond de piano majestueux. Après un début de concert un peu mou, les titres de Distractions font mouche. Loin de la joliesse assumée de certains titres, la menace pointe dans The Rough Bends, avec son spoken word, ses sonorités asiatiques, ses lignes de guitare. Cela rappelle que Tindersticks sont encore capables de prendre des risques et de surprendre malgré leur nouveau statut. C’est clair dès cet instant, Distractions va devoir retrouver sa place sur la platine.

L’orchestre à cordes magnifie Both Sides of the Blade, cette splendeur destinée à la bande originale du film de Claire Denis « Avec amour et acharnement », avant une fin de concert presque exclusivement dédiée au dernier album, au final entièrement joué. Always a Stranger confirme son statut de titre phare de l’album, le public donne de la voix, conquis, et le groupe termine son set avec un enchainement New World / Soon to Be April imparable.

Combien de groupes de ce calibre prennent prétexte d’un nouveau disque pour une tournée basée sur la nostalgie en se contentant de jouer deux ou trois nouveaux titres applaudis poliment ? Pas Tindersticks ! L’étude de la setlist montre même qu’aucun titre antérieur à 2012 (date de the Something Rain) n’a été joué !

C’est donc avec impatience que le rappel est attendu, est-ce le moment pour la séquence nostalgie ? Après un joli Stars at Noon, Stuart annonce un vieux titre sous les acclamations et enchaine avec Travelling Light pioché dans leur deuxième album de 1995. Titre sublime dont les vieux fans, présents en nombre dans la salle, devront se contenter.  Le groupe termine avec Show Me Everything et For the Beauty, comme un manifeste dans ces temps troublés.

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Texte : Laurent Fegly
Photos : Laurence Buisson

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