Plus de 30 après ses débuts, Slowdive a trouvé un second souffle depuis sa reformation en 2017, le groupe surfant en ce moment sur son momentum…

C’est actuellement la fête pour les afficionados du shoegaze old school. Apres l’annonce de la remontée sur scène de My Bloody Valentine après 7 ans de silence, à la fois Slowdive et Ride sont annoncés sur les planches parisiennes au cours de ce mois d’avril. Ceci témoigne du revival rencontré par cette mouvance ces dernières années, comme en témoigne le succès grandissant de formations comme DIIV et BDRMM.
C’est donc dans un Pleyel archi complet que Slowdive rejoue sur Paris, un peu plus d’an après une Cigale blindée. Fort d’un album très solide publié l’année dernière (Everything is alive), le groupe semble n’avoir jamais été aussi populaire, son statut culte se renforçant année après année depuis ses trois albums du début des années 1990. La preuve en est que le public est relativement jeune, très loin d’être composé de cinquantenaires voulant se rappeler leurs années de fac.
Comme sur certaines dates de fin 2024, la première partie est assurée par Drab Majesty, un groupe de cold wave en provenance de Los Angeles mené par Deb Demure. Le groupe s’est fait connaitre avec The demonstration, improbable concept album sur le suicide de masse et Modern Mirror en 2019. Pour tous ceux qui n’ont pas connu ou qui regrettent les années 80, le synthé super star et le kitsch triomphant, ce groupe est pour vous. Alternativement, on entend Depeche Mode période Master and Servant, des effluves d’Etienne Daho, New Order ou… Yazoo, sans la moindre tentative de modernisation. On ferme les yeux, et on se retrouve dans une machine à remonter le temps. Et on les rouvre pour vérifier que leur look est à l’unisson, perruques blondes et fond de teint de vampires. Assez difficile à fortiori quand on était déjà à l‘époque totalement réfractaire à ce mouvement, et qu’on essayait de convertir une cohorte de gothiques à R.E.M ou aux Replacements… Pourtant, on se laisse prendre, dans le genre c’est très bien fait et on se surprend à sourire et apprécier Ellipsis et autres Oxytocin. Le groupe a ses fans, nous avons pu apercevoir de nombreux tee-shirts. Par contre, le public nous a semblé particulièrement amorphe durant ce set, probablement l’effet Pleyel dont nous reparlerons plus loin.
Slowdive arrive sur scène à 21H15, précédé comme sur toutes les dates de la tournée par le Deep Blue Day de Brian Eno. C’est parti pour une heure 30 d’un setlist équilibrée entre les meilleurs morceaux des deux albums d’après la reformation, et d’autres piochés dans les trois albums historiques. Dès les premiers morceaux, Avalyn et Shanty, Rachel Goswell, star de la soirée, prend le lead avec ses mélopées si caractéristiques, et Simon Scott cogne sur une batterie qu’on entend beaucoup. Neil Halstead est à son habitude assez discret. Le light show est sublime, avec son défilé de lumières stroboscopiques et psychédéliques. Couleurs, graphiques, le tout en mouvement, tout est fait pour attirer l’œil, et aller de pair avec les vocaux rêveurs et les arpèges de guitare.
Si le set ne manque pas de dégager une certaine uniformité, les anciens titres se détacheront avec quelques déchainements de décibels bienvenus, quand les nouveaux auront une fibre plus mature influencée par l’écriture des années Mojave 3. Catch the Breeze, extrait de Just For a Day pourra ainsi rappeler à certaines oreilles les déflagrations de My Bloody Valentine. Ce titre est un incontournable en concert depuis plus de 30 ans et on comprend pourquoi. C’est un spectacle total avec en prime un jeu de lumières impressionnant.
Bien entendu, les meilleurs titres des deux derniers albums, Kisses et No Longer Making Time, sont joués et prouvent leur coté tubesque irrésistible. Mais même quand on essaie de vouloir montrer que les nouveaux morceaux tiennent la route, ce sont néanmoins eux qui font un peu retomber le soufflé (Chained to a Cloud, Slomo). Pour les cinq derniers titres du set, l’artillerie lourde est de sortie, et là c’est bien dans le vénéré Souvlaki que le groupe va piocher toute la fin du concert. Alison et When the Sun Hits convoquent la nostalgie, avant que le groupe ne joue en rappel Machine Gun, Dagger et 40 Days, morceau parfait pour refermer un excellent concert. Le mur de son que le groupe arrive à atteindre est vraiment impressionnant. Ont-ils déjà mieux joué ?
Malgré toutes les qualités de ce concert, nous n’avons pourtant pas senti un public démonstratif. Est-ce lié à la salle qui comporte beaucoup de places assises ? Ou à une musique que l’on apprécie en l’intériorisant ? Le concert a pu ressembler sur cet aspect au dernier concert de Beach House à l’Olympia…
Texte : Laurent Fegly
Photos : Gilles Barbeaux (merci à lui !)