Taniguchi
- Le sommet des dieux t.1
Kana/coll.
made in japan - 2004
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Fukamachi, photographe japonais accompagnant les expéditions
partant à l'assaut des cimes himalayennes, traîne son
spleen à Katmandou après l'échec d'une ascension,
soldée par la mort de deux alpinistes. Au gré de ses pérégrinations
dans la capitale népalaise, qui nous valent de
splendides planches rendant à merveille l'atmosphère
de cette ville mythique, Fukamachi découvre par le plus
grand des hasards l'appareil photo qui a sans doute
servi à Mallory dans son ascension de l'Everest en
1924, ascension au cours de laquelle il trouva la mort.
Cette découverte et ses conséquences plutôt
rocambolesques vont amener Fukamachi à rencontrer un
homme en qui il reconnaît le célèbre et charismatique
Habu Jôji, alpiniste disparu de la circulation depuis
très longtemps.
Cette rencontre marque le point de basculement du récit.
Exit Katmandou, retour à Tôkyô où Fukamachi, obsédé
par la figure de Habu, entame une enquête sur son passé
et les circonstances qui l'ont amené à disparaître.
Bribes par bribes, au gré des proches qu'il parvient à
rencontrer, Fukamachi dresse le portrait d'un homme dur,
obstiné, entièrement plongé dans sa passion de la
montagne.
Certains admirateurs du Taniguchi
intimiste des splendides L'homme
qui marche, Quartier lointain et Le
journal de mon père (somptueusement réédité en
un seul volume dans la collections Ecritures des éditions
Casterman) seront peut-être déstabilisés par ce récit
dopé à la testostérone. Car ici, Taniguchi,
adaptant un roman de Baku
Yumemakura, privilégie le geste épique, l'aventure
avec un grand A, celle où se côtoient des hommes
bourrus, passionnés, courageux et intrépides, avides
d'exploits inédits qui peuvent parfois paraître un peu
anachroniques mais qui n'en sont que plus beaux.
Taniguchi
parvient à merveille à transcrire le souffle épique
du récit grâce à de longues séquences d'escalade
dans lesquelles il se montre graphiquement au sommet de
son art. La beauté de la montagne, la grandeur des
exploits, la personnalité complexe des héros face à
l'adversité sont ainsi restitués avec une force inédite
en bande dessinée.
Ce premier volume de plus de 300 pages est le premier
d'une fresque qui s'étendra sur plus de 1500 pages et
contiendra cinq volumes. On peut d'ores et déjà parier
qu'on tient là un nouveau chef d'œuvre d'un auteur qui
échappe à l'étiquette intimiste qu'on lui avait un
peu prématurément collée pour révéler un talent
beaucoup plus protéiforme qu'on aurait pu le penser
jusqu'à présent.
Fred
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