Boilet
& Peeters - Tokyô est mon Jardin
Casterman
classiques - 2003
Tôkyô
est mon Jardin est
le deuxième album « japonais » de Frédéric
Boilet (en collaboration avec Benoît Peeters
au scénario) après Love Hôtel. Il a pour cadre
la capitale japonaise comme le titre l’indique. David
Martin, jeune français de 33 ans, est expatrié au
Japon en tant que représentant d’une marque de
cognac, et doit essayer d’implanter cette société
auprès des consommateurs locaux. Toutefois, le jeune
homme, en 2 ans, n’est pas parvenu à beaucoup de résultats.
Le patron de l’entreprise de cognac décide donc de le
rejoindre le temps de deux semaines au Japon, afin de se
rendre compte de l’avancée du travail et des
possibilités d’implantions réelles. Dans le même
temps, alors qu’il vient de se faire quitter par sa
copine, David rencontre une jeune japonaise, dont il
tombe amoureux. Alors, si son patron met fin au projet
d’implantation au Japon, comment pourra-t-il subsister
à Tôkyô et rester avec sa nouvelle amie ?
Tout d’abord, le dessin surprend au si
on n’y est pas habitué. Très réaliste, voire même
photo réaliste, uniquement en aplat noir et blanc. Il
apparaît au fil des pages de plus en plus magnifique,
et s’adapte totalement à la narration de Peeters.
Surtout, le trait est relevé par de somptueuses trames
de Jirô Taniguchi. Et si le dessin fait preuve
d’une originalité puis surtout d’une personnalité
intéressante, la mise en scène et le cadrage
sont eux-aussi tout à fait efficaces. Ils sont surtout
extrêmement dynamiques, alternant gros plan sur le
visage et plan d’ensemble.
Avant tout, les deux auteurs nous présentent
tout au long de l’œuvre un « faux » choc
culturel. Paradoxalement, c’est en insistant sur les
différences de détail, sur les préjugés ou les
images que les japonais se font des français (et réciproquement),
que les auteurs mettent en évidence l’universalité
de l’humain, par delà les différences culturelles.
C’est en mettant en scène les oppositions de culture
qu’ils nous permettent de saisir les coïncidences de
nature entre les personnages, et donc entre les peuples.
Et cela est présenté d’une manière très subtile,
qui s’intègre parfaitement à l’ensemble de la
narration.
Par delà, on nous offre une formidable
découverte du Japon, et une vision qui paraît extrêmement
impartiale du pays. Un regard dépassant les clichés
certes, mais présentant une vision sans concession
(comme sur le coût de la vie). Une formidable histoire
d’amour aussi, au cœur de l’intrigue, contée avec
la sobriété et la pudeur dont font habituellement
preuve les deux auteurs. Une des œuvres les plus intéressantes
de Boilet, et une excellente plongée dans la
culture japonaise.
Vincent
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