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Ramuz & Casanave - L'histoire du soldat 

6 pieds sous terre/coll. Blanche - 80p, 22.50€ - 2005

[3.0]

 

 

    Avant de réaliser sa première bande dessinée, Daniel Casanave a d’abord travaillé pour l’édition jeunesse et la presse. Depuis 2001, période qui consacre ses débuts dans le neuvième art, il s’est spécialisé dans l’adaptation d’œuvres littéraires. Il est le dessinateur d’Ubu roi d’après Alfred Jarry, des mamelles de Tirésias, selon le drame en deux actes de Guillaume Apollinaire, et de Macbeth d’après William Shakespeare.

 

    L’histoire du soldat ne déroge pas à la règle de l’influence littéraire puisqu’il s’agit de l’adaptation d’une pièce de théâtre d’un auteur suisse : Charles-Ferdinand Ramuz (1878-1947)

Cette pièce fut jouée en 1918 et mise en musique Par Igor Stravinsky, ami de l’auteur.

L’histoire du soldat est une fable où s’oppose le bien et le mal, l’art et l’argent facile, l’amour et la mort. Un soldat épris de musique rentre chez lui après une longue absence. Chemin faisant, il rencontre un vieil homme qui lui propose un marché : échanger son violon contre un livre « qui dit les choses avant le temps. » Après quelques négociations, le soldat finit par accepter. Sa vie s’en verra bouleversée.

 

    La bande dessinée de Casanave est réalisée en noir et blanc et s’ouvre sur des planches muettes et privées de personnage. Le lecteur est face à un décor de montagne, lequel n’est pas une image de carte postale. D’une part, le dessin n’est pas réaliste mais stylisé. D’autre part, il sent que quelque chose de grave va arriver. Le trait qui n’est pas régulier mais haché, les masses noires qui se distinguent du dessins créent en effet un climat effrayant. Il ne faut pas croire non plus que l’on soit dans un univers à la Bézian. Le dessin de Casanave n’est pas exclusivement inquiétant, il est aussi naïf, a quelque chose proche de l’enfance. La figure du soldat en est la meilleure preuve. Celui ci est à l’image d’un jouet, d’un soldat de plomb. N’est-ce pas d’ailleurs la manière la plus efficace de faire sentir qu’il n’est qu’un jouet du destin ?

                  

    La langue du texte ajoute beaucoup à la qualité de la bande dessinée. Elle est faite de rimes- ce qui peut lui conférer une certaine solennité - mais reste proche du langage parlé. Il est à noter que Charles- Ferdinand Ramuz revendiquait un style populaire, c’est ce que l’on peut appendre des « notes pour l’histoire du soldat » à la fin de la bande dessinée : « J’ai écrit une langue parlée : la langue parlée par ceux dont je suis né. » Pour aller plus loin dans la connaissance de l’auteur et de son œuvre, on pourra se reporter au site de Bruno Poirier, à la revue Europe n° 853 et aux œuvres complètes éditées par Slatkine, éditeur suisse. L'auteur a travaillé lui-même à cette édition  en a choisi les caractères typographiques, l'a corrigée. Elle reflète exactement sa conception de l'édition et est garante de sa pensée.

 

Stéphanie Pottier

Date de parution : avril 2005

 

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Le site de Bruno Poirier con sacré à Ramuz

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