BD

De Crécy -  Prosopopus     

Dupuis/coll. Aire libre - 2003

 

 

 

    Alors que son compagnon des débuts, Sylvain Chomet, avec lequel il s’est révélé au grand public pour La trilogie Léon la Came se consacre désormais ses travaux graphiques au grand écran (Les triplettes de Belleville), Nicolas de Crécy, lui, continue son œuvre et la radicalise un peu plus avec Prosopopus Bande dessinée ambitieuse et muette dans laquelle il nous plonge une fois de plus dans un monde fantasmagorique peuplé de monstres grotesques duquel on ressort difficilement indemne.

 

    Tout commence lorsqu’un homme important est abattu dans la rue, par un tueur à gages, au moment où il s’apprête à monter dans sa limousine. Le tueur rentre ensuite chez lui est et retrouve sa partenaire. Mais très vite des effluves de sang, de sperme, de fumée vont quitter le sol pour monter dans l’air et, par une réaction chimique incroyable, vont donner vie à un monstre hideux : le Prosopopus.

Le Prosopopus est une sorte de Barbapapa raté qui fume le cigare, aime jouer les cameramen amateurs et à l’occasion pratiquer la chirurgie.

 

    Sorte de polar étrange, aux confins de l’absurde et du cinéma muet, Prosopopus est une oeuvre radicale dans laquelle De Crécy met en place une trame scénaristique uniquement à partir de ses cases et sans la moindre information écrite. Formellement très fortes, les images dessinées de cette histoire renvoient à des cauchemars mais aussi à des thèmes d’histoires enfantines dans lesquelles les monstres se mêlent aux humains et perturbent le déroulement normal de leur quotidien. On retiendra notamment la scène d’amour torride entre le tueur à gage et sa compagne que De crécy met habilement en parallèle avec une scène d’autopsie du personnage assassiné par ce même tueur.

 

    Comme à son habitude De Crécy dessine dans son style très dépouillé et si caractéristique, fait de visages terrifiants, de montres gentils mais très laids, de lumières très sombres et d’ombres permanentes qui rendent l’univers de cette bd, totalement étrange.

 

    Alors si le monde singulier et surréaliste de De Crécy ne vous fait pas peur, si les monstres à cigare vous font rire, si vous aimez être étourdi par le rythme de la bande dessinée, nul doute que ce Prosopopus risque fort de devenir le compagnon idéal de vos prochaines lectures.

 

Benoît