Steven
Soderbergh s'essaye avec bonheur au film noir
avec The Good German. Avec bonheur
parce que le plaisir du réalisateur de rendre
hommage aux films noirs d'antan est évident, mais
malheureusement il ne le communique
qu'imparfaitement aux spectateurs.
L'histoire:
Jack Geismar, journaliste américain joué par George
Clooney, retourne à Berlin après la guerre
pour couvrir la conférence de Postdam entre les
alliés Truman, Churchill et Staline. Il connaît
la ville pour y avoir vécu plusieurs années
avant la guerre, et il compte saisir l'occasion
pour rechercher, sans trop y croire, un amour
perdu lorsqu'il quitta la ville, alors qu'il était
l'amant de Lena Brandt, son assistante, jouée par
Cate Blanchett. Lors de son arrivée à
Berlin, il est affublé d'un chauffeur bavard et
trop jovial pour être honnête, Tully, joué par Tobey
Maguire.
Il retrouvera Lena prostituée, avec Tully
comme maquereau irresponsable et combinard.
L'histoire d'amour laisse vite la place à une
tortueuse histoire de scientifique possédant des
informations sur un camp abominable mis en place
par les Allemands dans le but de construire de
mystérieuses fusées... Ce scientifique étant l'époux
-disparu- de Lena Brandt.
La
première scène est un clin d'oeil appuyé aux
vieux films noirs, quand Soderbergh filme Maguire
et Clooney en train de discuter dans une
voiture d'époque, avec le décor qui défile en
arrière plan... L'impression d'être devant un
film des années 60 est renforcée par le jeu des
deux acteurs qui imitent à merveille, et avec
respect, le jeu de l'époque. Mais en dehors de
cette scène, le film trouve sa personnalité
propre et moderne grâce au noir et blanc stylisé
dans lequel le film est tourné et à la mise en
scène classieuse de Soderbergh. Dommage
que ce noir et blanc soit trop souvent plus froid
que noir.
D'abord
en filigrane, la conférence de Berlin et le jeu
trouble entre les Russes et les Américains prend
peu à peu le dessus sur l'histoire d'amour du
journaliste, écrasée et ridicule après ces
terribles années de guerre. D'autant que la
recherche de Geismar remue de plus en plus
fortement les restes peu ragoûtants et encore
frais de la guerre. Malheureusement, l'histoire
est parfois inutilement compliquée et tend à
perdre le spectateur, au risque même de provoquer
un début de lassitude et de désintérêt lors de
quelques longueurs, au deux tiers du film. La
reconstitution et la description d'une Berlin
ravagée est impressionnante, frappante et
touchante, peut-être même plus par les mots que
par les images. Quelques scènes sont très fortes
et réussies, comme celle où George Clooney
retrouve sa dulcinée perdue, d'autres moins.
Malheureusement, l'histoire de « l'allemand
qui veut la vérité » n'est pas extrêmement
crédible, et son issue très prévisible...
Clooney
est plutôt bon, sans forcer son talent pour
autant dans ce rôle de journaliste bourlingueur
qui a décidé de regarder l'horreur en face,
quelle qu'elle soit. Enfoncé dans la boue jusqu'au coup, il décide encore d'y
mettre la tête pour voir ce qu'il peut y avoir
dessous... et il ne sera pas déçu. Cate
Blanchett, très belle et troublante, est très
convaincante dans son rôle de juive allemande
dont l'instinct de survie est poussé au
paroxysme, jusqu'à en faire une femme froide,
calculatrice et insensible, presque monstrueuse.
Dommage
que le film soit parfois plombé par des sentences
sur la seconde guerre mondiale dignes du PMU du
coin, d'autant plus quand il s'agit d'un thème
aussi délicat et crucial que celui de la
culpabilité du peuple allemand.
Pas
vraiment une réussite complète, le film ne tiens
pas toutes ses promesses, la faute à des
dialogues et un scénario un peu faiblards.
Adrien
Potocnjak-Vaillant
Film noir américain – Sortie le 14 février 2007
- Durée 1h45 - Avec George Clooney, Cate
Blanchett, Tobey Maguire.
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