Jeune
marié de vingt ans, Kamal a un énorme problème :
il n’arrive pas à satisfaire Loteh, son épouse
depuis trois mois. La première scène du film est
une double mise à nu du personnage : un déshabillage
total et méthodique derrière une porte, qui
n’est autre que celle du cabinet d’un médecin
connaissant bien Kamal et lui proposant le recours
à une femme mûre susceptible d’initier son
patient et du coup la confession que l’on
imagine malaisée du garçon.
Parti
en train pour la grande ville où demeure son
cousin, Kamal ressent des troubles face à une
voyageuse dont il partage le compartiment.
Toujours aussi peu performant avec la prostituée
dénichée par le cousin, Kamal est attiré par Véra,
une jeune femme croisée dans un bus. Qu’il épie,
qu’il traque – belle scène de Kamal fendant
la foule des ouvrières au sortir de l’usine -
jusqu’à dormir avec elle, mais sans aller plus
loin. Le retour inopiné du mari de Véra qui la découvre
couchée avec Kamal entraîne ce dernier sur les
voies dangereuses de la délinquance, semblant
l’éloigner davantage de l’objectif de son déplacement.
De
Kamal, on entend peu le son de la voix, mais on
retient surtout l’expression et l’intensité
du regard doux et pénétrant qu’il porte sur le
monde qui l’entoure et ses occupants :
interrogateur, perplexe mais le plus souvent
docile et acceptant les aléas du destin sans
rechigner, s’en accommodant avec à-propos. Il
se retrouve ainsi embringué dans des affaires
louches sans piper mot, sous l’autorité
incontestable du mari de Véra. Ce mutisme qu’il
ne faut pas assimiler à un statut de béni-oui-oui
n’empêche pas le jeune homme d’agir au moment
fatal et de parvenir enfin à son but.
Loin
de l’aspect folklorique de son précédent film L’ange
de l’épaule droite, Djamshed Usmonov,
qui a subtilement baptisé de son patronyme le médecin
bienveillant consulté par Kamal, élargit le
cadre et flirte avec l’universel : le garçon
villageois n’est nullement décrit comme un péquenaud
rustre et la trame pourrait en effet prendre place
dans n’importe quel coin du monde.
Pour
aller au ciel, il faut mourir se révèle donc
le singulier récit d’apprentissage d’un
curieux garçon, sorte de grand dadais curieux et
étonnamment naïf, ballotté entre de savoureuses
expériences où la trivialité le dispute à la
grâce. Et Djamshed Usmonov a été bien
inspiré de faire appel à son neveu pour
l’interprétation de Kamal.
Patrick
Braganti
Drame
tadjik – 1 h 40 – Sortie le 4 Octobre 2006
Avec
Khurched Golibekov, Dinara Droukarova, Maruf
Pulodzoda
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