Un homme, un vrai
de Jean-Marie & Arnaud Larrieu
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Un homme et une femme séparés depuis des années se
retrouvent fortuitement au fond des Pyrénées et jouent
pendant quelques jours au chat et à la souris, faisant
semblant de ne pas se reconnaître, s’inventant un
partenaire fictif, qui sert d’exutoire à leur propre
situation. Cette scène de ce long film de deux heures résume
bien l’ambiance décalée et faussement superficielle
de la dernière production des frères Larrieu, déjà
auteurs en 1999 de La brèche de Roland, moyen métrage
sur les vacances tumultueuses d’une petite famille en
montagne – les Hautes Pyrénées de leur enfance, chère
à leur cœur.
Projet plus ambitieux, Un homme, un vrai se présente
sous la forme d’un triptyque. Cela démarre par la
rencontre entre Boris, cinéaste publicitaire amateur
aux idées peu appréciées de ses commanditaires et Marilyne,
cadre supérieur dans une société cliente du susnommé
Boris. Au cours d’une soirée dominée par la couleur
rouge et une fantaisie digne de Rohmer, le couple
se crée. Nous les retrouvons cinq ans plus tard aux Baléares,
avec deux enfants en prime. Si la situation
professionnelle de Boris n’a guère évolué, peinant
beaucoup à trouver sa voie, tout va pour le mieux pour Marilyne
qui s’offre même une aventure amoureuse avec sa
patronne, entreprenante espagnole. La rupture est
consommée. Cinq années s’écoulent et ce sont les
retrouvailles quasi fortuites dans les Pyrénées, où
Boris est devenu un guide de haute montagne hors pair et
un connaisseur de la faune locale qui lui valent un
respect sans limites.
En
deux heures, les deux frères réalisateurs ont réussi
à créer trois univers différents, avec à chaque étape
un florilège de rôles secondaires truculents et à développer
une histoire d’amour et de désamour entre deux
personnes. Le changement de lieu et l’écoulement du
temps, dix années environ, donnent une impression de
vraie évolution et permettent un attachement sincère
aux deux protagonistes, d’autant plus que le film fait
passer pas mal de réflexions sur le couple et son
existence actuelle, souvent légères, voire frivoles,
parfois graves et plus profondes, sans que jamais le ton
de comédie soit abandonné.
Boris, c’est Mathieu Amalric, qui confirme film
après film son talent et sa capacité à évoluer hors
des rôles de trentenaire intellectuel, citadin et névrosé.
Il est absolument crédible en homme de la montagne,
solitaire et barbu. Nous pouvons penser ici à sa
prestation déjà loin des villes dans Amour
d’enfance, d’Yves Caumon.
Marilyne,
c’est Hélène Fillières. Cette comédienne,
à la taille assez impressionnante, a jusqu’ici
beaucoup participé à des films réalisés par des
femmes, puisque nous avons pu la voir notamment dans Vénus
beauté (institut) de Tonie Marshall et Reines
d’un jour de Marion Vernoux. Chez les Larrieu,
elle peut donner libre cours à sa fantaisie et exercer
toute une palette de jeux.
Les chansons interprétées par les acteurs et la
partition du film sont signés de Katerine, un
des chouchous de Benzine, dont l’univers décalé et léger
s’harmonise parfaitement avec Un homme, un vrai,
film-voyage attachant, idéale halte cinématographique
estivale. C’est donc le moment ou jamais...
Patrick
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