A
cinq heures de l'après-midi
de
Samira Makhmalbaf
Troisième film d’une réalisatrice précoce
Samira Makhmalbaf,
A cinq heures de l'après-midi
raconte l’histoire de Noqreh,
une jeune femme afghane qui vit avec son père, sa
belle-sœur et son bébé au milieu de réfugiés dans les ruines d’un Afghanistan déserté
par les talibans. Chaque jour, Noqreh fait un petit détour
vers l’école coranique, puis, en secret, telle une
Cendrillon afghane, enfile ses chaussures blanches à
talons, relève son tchadri et se rend dans une autre école
laïque où l’on apprend les principes de la démocratie
d’une manière un peu caricaturale.
Dans cette école, les filles débattent autour de nombreux
sujets et rêvent de devenir des femmes importantes dans une
société moins archaïque où elles auraient enfin la
parole. Noqreh, elle, veut comme Benazir Butho devenir
présidente de la république.
Pour son troisième, et sans doute plus
beau film, Samira
Makhmalbaf s’attache à décrire la condition des femmes dans le Kaboul
d’aujourd’hui en ruine à travers
la personne de Noqreh
une femme pleine de grâce qui semble incarner
l’espoir des femmes de ce pays.
Dans des paysages de misère, des maisons de
fortunes (une carlingue d’avion écrasé) filmés avec
élégance et beaucoup d’à propos, la réalisatrice
met en scène le quotidien misérable des gens qui
tentent de survivre dans des conditions déplorables et
veut, dit-elle « essayer
de corriger les fausses informations propagées par le
tourbillon frénétique de la politique et des médias. »
Sans esprit revanchard sur le passé,
sans haine contre les talibans, les personnages (les
femmes principalement) veulent reconstruire un pays dévasté
et le sortir de l’absolutisme religieux qui le ronge.
Sans porter de jugement définitif, Samira
Makhmalbaf filme des personnages perdus, des vieux accrochés à leurs
croyances, loin de tout. Tout au long du film, elle use d’une
forme d’humour particulier notamment dans un échange entre Noqreh et un
casque bleu français : une
scène dans laquelle l'héroïne
demande au jeune français comment son
président à fait pour se faire élire dans son pays et
quel était son discours. Bien embarrassé (et nous
morts de rire) le bleubite s’en sort difficilement en
expliquant qu’il n’a pas à faire de politique car
il est un soldat.
Entre humour, tristesse, espoir et mélancolie, la jeune réalisatrice
iranienne parvient à faire un film poignant dans lequel
elle fait une sorte d’état des lieux et tente de
comprendre une culture figée durant des années qui
semble vouloir évoluer, grâce au femmes, vers un avenir
plus radieux.
Très apprécié au dernier festival de Cannes, le film a
reçu le prix du jury.
Benoît
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