cinéma

Don’t come knocking de Wim Wenders 

[0.5]

 

 

    Howard Stence, vieil acteur sur le retour qui a connu son heure de gloire à la grande époque des westerns, est actuellement en plein désert sur le tournage d’un énième film. Plus exactement, devrait être en plein tournage car lorsque nous faisons connaissance avec lui, il galope à bride rabattue pour échapper à cette dernière péripétie d’une carrière définitivement derrière lui, noyée dans l’alcool, la drogue et les femmes. Notre cow-boy solitaire à travers les paysages grandioses du Nevada regagne la civilisation après avoir troqué sa monture et son costume de comédien. De retour chez sa vieille mère qu’il n’a pas vue depuis quelques décennies, il apprend l’existence de son fils, fruit d’une ancienne liaison lors de la réalisation de ce qui fut son plus grand film. Howard entreprend le voyage vers Butte, petite ville du Montana, où il retrouve Doreen et découvre Earl, leur fils, pas mal déglingué qui joue de la musique dans le bar local.

 

    Faites un film sur la découverte d’une paternité tardive accompagnée d’un come-back sur son passé, estampiller le tout « cinéma d’auteur » et vous êtes absolument certains de décrocher votre sélection pour le plus grand festival de cinéma au monde (Cannes au cas où…) et peut-être même la timbale finale. Si, si ça a bien marché pour Jim Jarmusch et d’ici quelques jours on subodore que le sujet de L’Enfant (Palme d’or des Dardenne) ne sera pas très éloigné de celui de ses éminents confrères américain et allemand.

Eh bien, cela fait peine : d’abord, on commence à avoir de sérieux doutes sur l’impartialité et le discernement des sélectionneurs cannois. Quel besoin de se coltiner des centaines de films pour in fine choisir toujours les mêmes cinéastes ? Passons si encore leur travail était méritoire. Car ce qui attriste plus profondément ici, c’est l’indigence du propos de Wenders qui manifestement n’a plus grand-chose à nous dire. C’était peut-être une bonne idée de reformer vingt années après le couple harmonieux qui présida – réalisation et scénario – à la création du sublime Paris, Texas ( Palme d’or du susdit festival en 1984) mais les deux compères, Wenders et Shepard, ont bien vieilli et on a l’impression que le talentueux réalisateur de L’ami américain a dû prendre ses distances avec ce projet.

 

    Bien sûr, la fascination exercée par les Etats-Unis sur l’allemand et son amour immodéré du cinéma sont encore présents dans Don’t come knocking mais vraiment de loin en loin. Quelques instants de grâce n’enlèvent rien à la lourdeur et à la banalité de ce parcours rédempteur très mal servi par un Sam Shepard qui nous en fait des tonnes. On finit même par bloquer sur sa ressemblance (d’accord, il n’y est pour rien) avec un Jack Lang plus empâté et plus marqué. En tout cas les deux cultivent l’outrance et le cabotinage avec la même constance.

 

    On aurait mieux fait de prêter plus attention à ce vieil acteur quittant le plateau d’un film médiocre et s’empresser de le suivre sur les traces de son fringant canasson. Deux heures volées au temps, c’est déjà pas si mal.. Ce bon vieux temps dont le passage inexorable est en train de laminer la création d’un des plus grands cinéastes européens …d’il y a vingt ans. Bonjour tristesse.

 

Patrick Braganti

 

Film Allemand, américain – 2 h 02 – Sortie le 12 Octobre 2005

Avec Sam Shepard, Jessica Lange, Tim Roth

 

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www.dontcomeknocking.com