Etre
et avoir de
Nicolas Philibert
« Etre et avoir » est un beau film, très
bien réalisé, avec une image superbe, des cadrages
parfaits et des lumières naturelles remarquables.
C’est aussi un film émouvant, touchant de part la
personnalité des élèves mais aussi et surtout de par
la relation quasi-filiale qui unit les élèves de la
classe et le maître monsieur Lopez, à la fois
instituteur, psychologue, philosophe et même
confesseur.
Nicolas Philibert, auteur par le passé de films
documentaires remarquables, prouve une fois de plus
qu’il sait saisir la vie et la restituer avec justesse
sur la pellicule, sans en faire trop, avec une vraie
simplicité.
Mais malgré ses qualités indéniables, « être
et avoir » amène à se poser certaines quant au
choix et au parti pris de Philibert sur le fond du film.
En effet, dès le départ, on se rend vite compte
qu’il a une idée bien précise de ce qu’il veut
filmer, qu’il ne veut pas filmer l’école à travers
l’exemple d’une classe, mais de filmer la vie, les
relations humaines dans une classe. Et d’ailleurs ce
n’est pas un hasard si c’est cette école et pas une
autre, puisque le réalisateur avouera avoir visité une
centaine de classes avant de se décider pour celle-ci.
Donc son point de vue est hyper subjectif, et ce serait
une erreur pour le spectateur de penser que ce film est
une représentation classique du métier d’enseignant
ordinaire. Bien au contraire, le personnage de Monsieur
Lopez laisse très vite apparaître une représentation
idyllique de l’enseignant, avec quelque chose de
nostalgique, un côté « recette à l’ancienne »,
donnant l’image de l’enseignant modèle qui impose
une forme de discipline qui peut paraître dépassée à
certains. De plus le montage renforce cette idée de
toute puissance de l’instituteur, car à aucun moment
Philibert ne montre Monsieur Lopez en situation
difficile ou même en colère. Jamais il n’est en
porte-à-faux face à ses élèves. On a l’impression
d’être dans une classe où règne calme et
tranquillité et où tout se règle dans la douceur et
par la discussion ce qui est somme toute assez frustrant
je trouve.
Finalement, on quitte le film un peu rassuré et plein
d’espoir et on se dit que finalement il existe encore
des classes où la discipline n’est pas l’activité
première de l’enseignant, où l’on peut prendre le
temps de travailler sereinement. Certains y trouveront
la nostalgie de leur enfance, les plumiers et les
blouses grises en moins. D’autres y verront un mode
d’enseignement dépassé, un instituteur d’une autre
ère, une sorte de dinosaure
en voie de disparition. Mais quoi qu’il en
soit, ce film ne laissera personne indifférent et
mettra à contribution les émotions et les représentations
de chacun. A mon avis, un film qui devrait connaître un
certain succès dans les salles en cette rentrée
scolaire 2002.
Benoît
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