Kiki
la petite sorcière
d'Hayao
Miyazaki 1/2
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En attendant la prochaine
œuvre du maître, les distributeurs occidentaux ont la
bonne idée de nous faire découvrir les anciens films
de Miyazaki (ou « re »découvrir,
pour les nerds mangaphiles qui ont déjà usé leur VHS
ou DVD importé). Après l’excellent Château dans
le ciel de l’an dernier, voici qu’atterrit dans
nos salles à l’aide de son balai magique, Kiki la petite sorcière. Tourné en
1989, il se situe à l’exacte croisée des chemins des
2 anime qui le précèdent
à savoir Mon Voisin Totoro et ce
même Château dans le ciel : il possède
à la fois la simplicité de l’un, et l’ancrage
« réel » de l’autre. Toutes proportions
gardées bien sûr car chez Miyazaki, le
merveilleux s’invite en permanence.
Le film débute sur le regard un peu grave d’une jeune
fille étendue dans l’herbe, contemplant le ciel. Sa décision
est prise, elle partira ce soir, et quittera sa famille
afin d’effectuer son apprentissage de sorcière. Très
vite l’euphorie s’empare de Kiki, et c’est tout le
film qui se trouve résumé dans cette séquence
introductive : au bonheur de voler de ses propres
ailes (ou sur son balai…) se superpose la peur de
l’inconnu, de ce grand vide qui se présente devant
elle et qu’il s’agira de combler. On l’aura
compris, Kiki s’intéresse donc à
l’adolescence, à ses interrogations éternelles et à
ses émotions exacerbées.
Le scénario, simplissime, n’est que la succession des
diverses rencontres et expériences de la jeune fille,
formant part de son apprentissage de la vie avant tout,
sans doute le sujet « miyazakien » par
excellence au bout du compte. Et comme d’habitude,
c’est absolument sublime, fin, drôle, émouvant.
Esthétiquement limpide, le film a pour cadre une ville
un peu bâtarde de type européen, sorte de mélange
entre Stockholm et Bruxelles, au bord d’une mer qui
pourrait être la Méditerranée (un vrai fantasme en
somme !). On retrouve les archétypes « Miyazakiens »
de la grand-mère, du frère qui deviendra probablement
l’amoureux, les thèmes de l’accomplissement par le
travail, de la vie au sein d’un grand Tout qui inclue
aussi bien toutes les catégories sociales que les
animaux etc.
Refusant comme toujours tout manichéisme, multipliant
les pistes narratives possibles, Miyazaki
parvient de manière admirable, et d’autant plus dans
le cadre d’un film aussi clair et à priori léger que
celui-ci, à poser les enjeux psychologiques de son
personnage principal, à faire sentir ses doutes, ses
joies, ses peines, le cheminement de sa pensée.
Alternant sans cesse les scènes cocasses, via notamment
le compagnon de Kiki, son irrésistible chat noir (sorcière
oblige !), et les moments plus graves (le film
raconte quand même l’histoire d’une gamine de 13
ans qui quitte sa famille pour vivre seule !), il
affirme cette philosophie douce et tranquille qui
trouvera son climax dans le sublime Voyage de Chihiro :
peu importe notre statut, notre condition, notre classe
sociale, notre pouvoir même, l’important est de se
trouver et de trouver sa voie. Pour être une bonne
grand-mère, une bonne sorcière, un bon boulanger, un
bon chat ou un bon chien. Pour être soi-même.
Laurent
Japon
– 1h42 – sortie le 31 Mars 2004
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