La
cité de Dieu
de
Fernando Meirelles
Parmi tous les clichés souvent
bien réels circulant sur l’Amérique du Sud, on a
souvent à l’esprit les grandes villes tentaculaires
comme Rio de Janeiro ou Buenos Aires, avec leurs favelas
envahissantes et leurs habitants miséreux à forte
proportion enfantine.
Le film de Fernando Meirelles
nous plonge en pleine favela brésilienne sur une
vingtaine d’années pendant lesquelles il suit la
trajectoire de Fusée, jeune garçon trop tendre pour
devenir bandit, mais trop intelligent pour accepter
n’importe quel job mal payé et d’autres jeunes gens
aux vues beaucoup moins recommandables.
Adapté d’un roman homonyme de Pablo
Lins publié en 1997 qui a connu un énorme succès
dans son pays, mettant en scène plus de 300 personnages, La
cité de Dieu est le troisième film de Meirelles,
ancien étudiant en architecture converti à la vidéo et
à la publicité dont il est un des réalisateurs les plus
demandés au Brésil.
Concentré sur l’existence de
Fusée, de sa famille et de son environnement, le film revêt
aussi un aspect documentaire grâce à un filmage très
serré caméra à l’épaule et un montage très haché.
Nous sommes donc véritablement
au milieu de la favela et de ses gangs rivaux dans le deal
des drogues et l’ambition d’obtenir le commandement et
le contrôle de tous les trafics, par tous les moyens
possibles, souvent violents et meurtriers.
Et des crimes, du sang, des coups
et de la violence, le film n’en manque pas, quitte à
provoquer un malaise proche de la nausée, renforcée
aussi par des images très "clipesques", très
pub en fait, qui m’ont apparu parfois inappropriées
compte tenu d’un sujet douloureux.
J’ai ressenti comme une gène
face à l’aspect par trop esthétisant du film, qui
finit par le rendre moins fort et crédible.
C’est regrettable, parce que Fernando
Meirelles a su s’entourer de jeunes acteurs
convaincants, trouvés suite à un casting géant, épaulé
par des professionnels locaux du théâtre et de troupes
de jeunes comédiens. Il y a des gueules, des tempéraments
dans ce film et souvent d’ailleurs chez les plus jeunes
acteurs.
Cependant, si
vous allez au-delà de l’aspect formel discutable, il
faut être respectueux et admiratif sur le fond développé
par La cité de Dieu. D’abord, parce qu’il révèle
en France un nouveau réalisateur sud américain, efficace
et qui allie le savoir-faire hollywoodien aux réalités
socio-économiques de son pays. Ensuite, parce qu’il
traite ainsi d’un vrai
sujet grave et terrible, qui met à la rue des
centaines de gamins, les condamnant à plus ou moins
longue échéance.
C’est donc lorsqu’il montre
et dénonce que ce film prend toute son ampleur et peut être
reçu comme un véritable coup de poing et un état de la
situation catastrophique des grandes métropoles au Brésil,
donnant un aperçu réel et terrible de ce qui attend le
nouveau président Lula. Dès lors, nous nous montrerons
plus indulgents sur ce déluge d’images léchées.
Patrick
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