Le château ambulant de
Hayao Miyazaki 1/2
|
|
|
|
La jeune Sophie, chapelière de son état, est victime
d’un maléfice. Parce qu’elle a croisé la route du
non moins jeune magicien Hauru, l’ennemie de ce
dernier, la Sorcière des Landes, l’a transformée en
grand-mère. Sophie se résout alors elle-même à
l’exil et se trouve à nouveau sur le chemin de Hauru,
du moins celui de son château mobile. Elle s’y impose
comme femme de ménage et découvre l’univers du
magicien, auquel elle ne résiste pas bien longtemps.
Il est très difficile de ne pas aimer cette dernière
œuvre de Miyazaki, virtuose de l’animation japonaise s’il en est. Non pas
qu’elle soit exempte de reproches. Mais son atmosphère
et sa richesse sont envoûtants. Cela ne surprend pas de
la part du chef de file du Studio Ghibli, dont les précédentes
productions (Le
Voyage de Chihiro, Princesse
Mononoke, Porco
Rosso, Le Château dans le ciel, etc) véhiculaient les mêmes sensations.
Le coup de génie du Château
ambulant est faire de son héroïne une femme âgée.
Au-delà du risque commercial qui aurait arrêté plus
d’un producteur, c’est un moyen brillant
d’expliciter les émotions de Sophie. Chaque nouvelle
expérience intense est l’occasion d’une subtile
transformation physique qui en dit plus long sur ce que
pense l’héroïne que n’importe quelle parole (on
imagine le travail de l’équipe d’animation). Toutes
les réflexions sur l’âge qui en découlent sont évidemment
d’autant plus pertinentes. D’ailleurs, Miyazaki
lui-même évoque sa possible retraite après le
prochain film. C’est une annonce qu’il a régulièrement
fait, mais qui ne peut que devenir plus tangible avec le
temps.
L’univers propre au réalisateur est incorporé de façon
très homogène au roman de Diana
Wynne Jones, Howl's moving Castle, qui a servi de base à ce film d’animation.
Transporté dans un monde en apparence idyllique mais au
bord d’une crise militaire et où la magie est un
commerce, le spectateur prend plaisir à suivre les
aventures de Sophie au fil de ses rencontres. Mais là où
Miyazaki a eu
une idée fabuleuse en vieillissant son personnage
principal, il pêche en étant au bord de la répétition.
La ville (ou plus exactement les villes) de ce film est
une copie presque conforme de celle de Kiki,
la petite sorcière. Au bout de quelques dizaines de
minutes, Sophie ne se déplace plus sans être suivi par
des personnages pour le moins singuliers, mais à qui
elle a rendu service et qui ont donc une dette envers
elle. C’est le même processus qui avait été utilisé
dans Le Voyage de
Chihiro. Enfin, on retrouve cette référence à Metropolis,
commune à beaucoup de réalisateurs de films
d’animation japonais, mais particulièrement récurrente
chez Miyazaki,
par l’intermédiaire d’une “ville gratte-ciel”,
et à laquelle Le
Château ambulant n’échappe pas.
Ce
qui rend la critique négative impossible, c’est que
le recyclage de ces éléments (on pourrait presque
parler d’auto-citation) est fait de manière vraiment
brillante et s’accompagne de toujours plus de
trouvailles visuelles et narratives. Les tourments que
subit la Sorcière des Landes sont saisissants. Le sérieux
et la maturité de certaines scènes rappellent la plus
réussie des productions Ghibli, Princesse
Mononoke.
Le
Château ambulant
tire ses qualités de l’originalité de l’histoire
de base, que Miyazaki
s’est appropriée avec talent, et de la créativité
de ce dernier. C’est encore elle qui sauve le réalisateur
quand il est sur le point de se répéter. Le talent ne
s’explique pas.
Sébastien
Raffaelli
Film
japonais – 1 h 59 – Sortie le 12 janvier 2005
Musique
originale : Joe Hisaichi
Titre
original : Howl’s
moving Castle
>
Réagir
sur le forum cinéma
|