Les
petits fils de
Ilan
Duran Cohen
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Ilan Duran Cohen,
écrivain et cinéaste, est un clown triste dont l’œuvre
est traversée par les larmes et par le rire. En 2000 il
traita avec légèreté et sophistication littéraire de
La confusion des sentiments.
Il
nous revient "avec un film plus intimiste, réalisé
hors des sentiers de production classiques, uniquement
motivé par le rêve et l’utopie, produit avec les
moyens du bord".
L’économie
de moyens qui passe par l’emploi d’une caméra numérique
donne aux Petits Fils un aspect film de famille
bricolé qui multiplie les zooms sur les visages, les
angles biscornus et les prises tremblantes.
Et
de famille il en est largement question dans
l’histoire de ce couple improbable constitué par
Guillaume et sa grand-mère Régine. A vingt-quatre ans,
Guillaume est en plein questionnement et se remet très
mal de la mort prématurée de sa mère atteinte d’un
cancer. Parisien pour ses activités, il réintègre
souvent à Angoulême le domicile de sa grand-mère pour
des séjours conflictuels et tendus. Tous deux à leur
manière doivent accepter la disparition. Comme souvent
chez Duran Cohen, notamment dans ses écrits, on
retrouve le leitmotiv troublant de la séparation.
Entre grands sentiments et petites bassesses, le duo ne
se ménage pas dans une relation drôle et orageuse.
Guillaume utilise Régine comme déversoir de ses idées
sombres et de son incapacité à évacuer la mort de sa
mère. Alors qu’il apparaît fragile et peu confiant,
la grand-mère au contraire fait preuve d’une énergie
et d’une volonté de ne pas baisser les bras
salvatrices. Débordée par ses petits ennuis
domestiques (visite incessante de différents ouvriers),
elle embauche un jeune étudiant promu au rang
d’arbitre dans les passes d’armes entre Guillaume et
Régine sur lesquelles il pose un regard extérieur
empreint d’envie et d’étonnement.
Les Petits Fils
n’est pas le film de l’année et il faut le voir
pour ce qu’il est : une chronique douce-amère
d’un travail de deuil en gestation. Largement inspiré
de la propre expérience du cinéaste marqué par sa
judaïté et son attirance pour les garçons, le film
vaut surtout par ce couple de non-professionnels uni par
le même lien dans la vie privée. Apparemment improvisé
et foutraque, le scénario est écrit jusqu’à la
moindre virgule. L’ancrage dans l’authenticité
passe par l’aspect quasi documentaire, alors qu’il
s’agit bien d’une fiction, saupoudré d’infimes détails
comme des photos et des lettres de la défunte.
Duran Cohen
qui n’oublie pas « qu’un film n’est
qu’un vaste mensonge organisé, même s’il prétend
à une certaine vérité » insuffle presque à
notre corps défendant de l’émotion et de l’humanité
dans un opus singulièrement séducteur et attachant.
Patrick
Braganti
Français
– 1 h 30 – Sortie 17 Novembre 2004
Avec
Reine Ferrato, Guillaume Quatravaux
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