cinéma

Nathalie de Anne Fontaine 1/2

 

 

    Dans Nettoyage à sec, un petit couple de commerçants voyait son univers rangé basculer suite à la rencontre d’un jeune danseur porteur de renouveau et de troubles en tous genres. Dans Comment j’ai tué mon père, c’était le retour du père qui semait la confusion dans un couple sévèrement ébranlé par le conflit latent entre celui-ci et son fils. La force des sujets, ainsi que la chair et l’épaisseur données aux personnages, rendait ces deux films intéressants et nous faisait placer pas mal d’espoirs en cette réalisatrice ancienne comédienne, aussi scénariste et dialoguiste.

 

    Hélas, cet espoir est aujourd’hui bien déçu par Nathalie, film fort convenu à la limite d’être insipide. Une grande bourgeoise, Catherine gynécologue de son état, très peu présente à son travail découvre en écoutant les messages du portable de son mari Bernard que celui-ci la trompe. Plutôt que d’avoir à subir cet affront, elle décide en traînant ses escarpins dans un bar à hôtesses de choisir la future maîtresse de son mari en l’affriolante et sculpturale Marlène, qu’elle rebaptise Nathalie. Le corps du film est alors constitué des rencontres des deux femmes pendant lesquelles la dévergondée et imaginative Nathalie raconte par le menu, grivois et surtout répétitif ad nauseam ses frasques avec Bernard à la très distinguée (frigide, coincée, morte d’ennui en recherche de sensations ???) Catherine.

Tout cela n’a malheureusement que très peu d’intérêts et on regarde souvent avec ennui et fort peu de compassion ce parcours chaotique, mais surtout terrifiant de vide, de ce couple bourgeois qui court les dîners mondains et les spectacles. Alors bien sûr, l’interdit, le tabou, personnifiés par cette accorte hôtesse ont tout pour attirer et pimenter l’existence de Catherine, dont on pourra tout de même trouver tortueux sinon cynique le chemin emprunté pour une reconquête – provisoire ? – de son mari.

Malgré un trio de grosses pointures devant les caméras, presque caricaturales ou mal employées, le film décidément ne prend pas. Fanny Ardant (Catherine) est trop prévisible, entourant son rôle d’une aura mystérieuse ou énigmatique peu crédible. Bien sûr, Emmanuelle Béart (Marlène devenue Nathalie) est toujours une bonne actrice, même si ici on s’attache davantage à sa plastique. Quant à Gérard Depardieu (Bernard), on a un peu l’impression qu’il se contente du minimum syndical.

Et quand je me suis mis à comparer les lèvres charnues (siliconées ?) des deux actrices et à me polariser sur l’organe nasal de l’acteur, il était couru que ce film ne retiendrait pas durablement mon attention.

 

    Dépassée par son sujet pourtant si peu graveleux et tellement convenu ou impressionnée par son trio d’acteurs prestigieux, Anne Fontaine rate la marche d’un opus grand public en renonçant – momentanément, on peut le souhaiter – à ce qui jusqu’ alors donnait à son cinéma toute sa valeur : un regard bienveillant mais pas indulgent sur les autres, révélant au passage une connaissance empirique et digérée de la nature humaine. Il me reste à attendre son long métrage suivant...

 

Patrick