cinéma

Pompoko de Isao Takahata

[3.5]

 

 

Les tanukis, animaux semi-divins de l'archipel nippon, mènent une vie paisible, voire rabelaisienne, jusqu'à ce que l'expansion de la ville de Tokyo n'entame singulièrement leur espace vital forestier et, par la même occasion, leur enthousiasme. Surprise par tant d'audace et d'irrespect, la communauté de tanukis concernée ne sait pas comment réagir : certains membres prônent l'action violente, d'autres la tentative de compréhension au nom de la coexistence pacifique qui a jusqu'alors prévalu entre eux et les humains.

 

Les années passent, les anciennes productions du Studio Ghibli continuent de connaître une deuxième vie en Europe et n'en finissent pas de nous ravir, d'autant plus qu'elles gardent une fraîcheur inaltérable. Ce Pompoko, produit en 1994, en est la preuve. La gamme des thèmes abordés est immense et toujours pertinente.

Nettement moins enfantin que Kiki la petite sorcière, moins anti-modernité que Princesse Mononoke, ce long métrage d'animation opère un juste milieu entre le divertissement et la réflexion. Pour cela, le Studio Ghibli puise au plus profond du patrimoine japonais en utilisant les personnages des tanukis. Ils font partie du bestiaire fantastique du Japon médiéval, qui n'est autre qu'une variation sur l'animisme. Il s'agit d'ailleurs là d'une large source d'inspiration pour l’ami de Takahata, Hayao Miyazaki, et sa bande. Les parapluies à une jambe, les monstres-objets, les animaux fantasques trouvent notamment un fort écho dans Le Voyage de Chihiro. Le réalisateur utilise cette croyance traditionnelle de façon tour à tour ludique (cérémonies joyeuses des tanukis qui célèbrent leurs "roustons faramineux") et sérieuse (la mort de nombre d'entre eux est explicitement montrée).

 

Evidemment, au niveau technique, Pompoko accuse le poids des ans. Les graphismes sont simplistes tout en restant fidèles à l’esprit Ghibli et la fluidité n’est pas toujours au rendez-vous. Mais l’ensemble reste efficace et ne nuit pas au plaisir que l’on prend à regarder le film.

Rythmée de façon plus ou moins heureuse, Pompoko compte deux-trois longueurs dans les scènes de prise de décision. Mais cela est contrebalancé par plusieurs passages très dynamiques de chants, d’humour ou de scènes d’"ction". On prend un grand plaisir à suivre les rebondissements du sort des tanukis et tous les stratagèmes loufoques qu’ils inventent pour se débarrasser des humains envahisseurs.

 

La formule est connue, mais ce long métrage est bel et bien accessible aux petits comme aux grands. Sa conclusion (on est presque tenté de dire “morale“ tant on est proche de la fable) n’est pas farouchement opposée à la modernité, mais rappelle l’importance du souvenir des valeurs anciennes et des traditions. En cela, cette production est de façon explicite la plus nippone du Studio Ghibli (avec Mon voisin Totoro), quand d’autres exploitent des univers plus cosmopolites, pour ne pas dire occidentaux (Porco Rosso, Kiki la petite sorcière, …).

 

Sébastien Raffaelli

 

Film japonais – 1h59 – Sortie le 18 janvier 2006 Avec les voix de : Makoto Nonomura, Yuriko Ishida, Akira Kamiya…

 

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