musique

Boom Bip - Blue eyed in the red room  

Lex/Pias - 2005

 

 

 

    Difficile d’imaginer, ou de se souvenir, que Boom Bip a débuté au sein de l’écurie Anticon. Dans ce Blue eyed in the red room, c’est l’électronica planante, tournante en boucles, qui règne. Moins sombre et plus accessible que son premier opus, Seeds to sun, Boom Bip continue d’explorer une voie médiane, s’éloignant du hip-hop, même expérimental, tout en restant à la lisière de l’électro. On ne sait trop où le situer, surtout que quelques chansons viennent ici se confronter aux longues boucles envoûtantes, comme cimple qui ouvre l’album.

 

    Ce qui ressort avant tout, c’est donc ces plages languissantes sans être contemplatives : Boom Bip fait sourdre les sons et les entoure de petits détails inattendus, construisant ainsi des architectures accessibles et intrigantes. On s’installe au milieu de ces morceaux comme on entre dans un labyrinthe qui ne nous effraierait pas : on ne sait trop comment ça commence ni si ça va finir, on y est, c’est tout.

Dès lors, on a parfois l’impression de se trouver face à une seule longue plage musicale qui varierait peu, et qui chercherait à nous envelopper de ses petites variations. On pense parfois à du trip-hop sans son côté obscur, ou à du Boards of Canada moins naïf (The move). D’où parfois des surprises causées par l’apparition de quelques voix, qui viennent nous rappeler que nous ne sommes pas seuls avec le disque, que des êtres humains existent encore. C’est d’abord sur Do’s and don’t où une psalmodie presque mystique vient se muer en paroles parlées/chantées qui se dédoublent en leur propre écho : les boucles s’entourent , nous encerclent. C’est Gruff Rhys, chanteur des Super Furry Animals, qui vient ici montrer une autre facette de cette musique.

 

    Le disque repartira ensuite dans ses explorations étranges, parfois magiques (Girl toy), parfois innocentes en apparence (Dumb day), parfois lumineuses(Eyelashings), ou encore, c’est plus inattendu, réduites à une guitare sèche dominante, pour un « folk » aussi incongru que finalement, évident, puisque le disque semble constamment explorer des voies qui pourraient s’opposer mais cherchent à nous montrer combien la musique peut nous parler, simplement. (One eye round the warm corner).

Et c’est justement à nouveaux avec une voix –et quelle voix, celle de Nina Nastasia – que le disque nous ramène vers chez les vivants, puisque l’électronica n’est pas vraiment une musique qui se partage, elle paraît plutôt destinée à une solitude bienveillante, une voix donc vient nous confier, magnifiquement, doucement, presque tendrement, que non, tout ceci n’était pas si beau qu’on avait pu le croire puisque « we do not talk of feelings / and I don’t believe in the power of love ». Cette fille murmurera ensuite qu’elle s’en va, et c’est décidément cette impression de solitude qui clôturera ce disque envoûtant, relativement ardu, mais décidément vers lequel il sera bon de revenir se perdre, se sentir si incroyablement seul.

 

Matthieu Jaubert

 

Tracklist :

01/ Cimple
02/ The Move
03/ Do's & Don'ts
04/ Girl Toy
05/ Dumb Day
06/ Eyelashings
07/ Soft & Open
08/ One Eye Round the Warm Corner
09/ Aplomb
10/ The Matter (of Our Discussion)

Date de sortie : 21 février 2005

 

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