musique

Bright Eyes -

I’m Wide Awake, It’s Morning1/2

Digital Ash In a Digital Urn     1/2

Saddle Creek/PIAS - 2005

 

 

 

      Conor Oberst est un de ces artistes que la presse aime à qualifier de génie. La raison ? Elle est toute bête. Et a plusieurs visages. Deux pour être exact.

La première est que notre homme, leader émérite de Bright Eyes – groupe déjà culte et responsable de quelques unes de nos plus beaux frissons musicaux de la seconde moitié des années 90 – a un talent fou d’auteur-compositeur. Réellement habité, il a un vrai don pour la belle mélodie (les premiers disques du groupe en regorgent) et les arrangements classieux, sans jamais être classiques. Et puis il y a ces textes, entre désabusement total, noirceur infinie et critique politique acerbe.

La seconde raison de cette image de « génie » qui lui colle à la peau vient sans aucun doute du fait que notre homme est un stakhanoviste de la musique, un forcené de l’accord, un forçat du mot juste: premier album à 14 ans, des groupes en pagaille, des collaborations nombreuses. Agé aujourd’hui de 24 ans, il confirme cette réputation en sortant le même mois, le même jour et à la même heure deux nouveaux albums.

L’industrie de la musique est en crise parait-il ? Conor et Saddle-Creek (le label qu’il a créé il y a quelques années) s’en fichent éperdument, prenant tout le monde à revers en publiant donc deux nouveaux opus. L’un dans la tradition Bright Eyes-ienne, très ancré folk, folk-pop (et ses dérivés), « I’m Wide Awake, It’s Morning » et un second, moins facile d’accès, un poil plus expérimental et spé, « Digital Ash In a Digital Urn ».

 

    I’m Wide Awake, It’s Morning

   Prenons les choses dans l’ordre. Et commençons par parler de l’album le plus « commun », celui qui sonne le plus comme du Bright Eyes. Autant avertir ceux qui n’auraient pas eu le plaisir de jeter une oreille sur ce nouvel opus, I’m Wide Awake, It’s Morning est du Conor Oberst tout craché. Avec ce je-ne-sais-quoi en plus de country et d’americana qui ajoute un certain charme aux chansons.

En tout et pour tout, dix morceaux de bonne facture. Des chansons comme First Day Of My Life (petite comptine pleine d’amour et de bonheur, assez rare chez Oberst), Lua (où se mêlent désespoir et solitude) sont de vrais bonheurs musicaux, tout en acoustique.

Histoire d’agrémenter le tout, Bright Eyes a eu la bonne idée d’inviter la grande Emmylou Harris sur trois titres, trois grandes réussites du disque.

Ajoutez à cela deux morceaux plus enlevés, dont le très réussis Road To Joy, qui clôt le disque, et l’affaire est entendue.

Ce disque n’est pas le meilleur disque du groupe. C’est évident. Une certaine redondance dans les accords et dans les passages chantés en atténue la qualité. Letting Off the Happiness ou Lifted or the Story Is in the Soil, Keep Your Ear to the Ground, lui sont intrinséquement supérieur, musicalement et textuellement parlant. Il n’empêche, cet album est un disque agréable et touchant, parfait pour rentrer dans la discographie de Bright Eyes.

 

    Digital Ash In a Digital Urn

   Les fans ne diront peut-être pas la même chose du deuxième disque. Ici, changement de trajectoire : le groupe s’essaie à une musique plus expérimentale, teintée d’électro. La batterie se fait lourde, plus oppressante, l’ambiance est plus noire (la pochette en est d’ailleurs le parfait exemple).

Le jeune troubadour que l’on connaissait, sa guitare et ses accords en bandoulière, se transforme en ange noir. Même si Arc of Time se rapproche (malgré sa rythmique soutenue) des productions habituelles de Bright Eyes, on ne peut pas en dire autant du reste de l’album. Des chansons comme Down In A Rabbit Hole, Take It Easy ou Light Pollution ont une production assez imposante. Les riffs de guitare de  Nick Zinner des Yeah Yeah Yeahs confirme cette impression.

Pourtant, on aurait tort de passer à côté de ce disque. Car il contient de bons morceaux, comme les tubesques Easy/Lucky/Free et Gold Mine Gutted ou l’excellent (et enlevé) I Believe In Symmetry. Et a une tenue plus qu’intéressante.

Déroutant au premier abord, surprenant au second, attirant au troisième Digital Ash In a Digital Urn est un album qui ne dévoile ses charmes qu’après plusieurs écoutes.

 

    Bilan

    En 22 morceaux et deux albums, Conor Oberst et Bright Eyes, une fois de plus, réussissent à convaincre par leurs talents d’écritures et de musiciens, malgré certaines faiblesses décelées ici et là.

Sans forcément révolutionner leur musique, le groupe la fait avancer. Sans perdre pour autant ce qui fait sa force.

Le groupe, via ces deux disques, est en train de devenir une des « hype » du moment, Télérama et autres Inrocks semblant enfin découvrir son talent et ses disques. On devrait donc encore en entendre parler pendant quelques temps de Bright Eyes et de son « génie » de leader. Il était temps.

 

Olivier Combes

 

I’m Wide Awake, It’s Morning Tracklist :

1. At The Bottom Of Everything - (with Jim James)
2. We Are Nowhere And It's Now - (with Emmylou Harris)
3. Old Soul Song (For The New World Order) - (with Emmylou Harris)
4. Lua
5. Train Under Water

6. First Day Of My Life

7. Another Travellin' Song

8. Landlocked Blues - (with Emmylou Harris)

9. Poison Oak

10. Road To Joy 

 

Durée: 45’41

Date de sortie : 25 janvier 2005

 

Digital Ash In a Digital Urn Tracklist :

1. Time Code 

2. Gold Mine Gutted

3. Arc Of Time (Time Code)

4. Down In A Rabbit Hole - (with Nick Zinner)

5. Take It Easy (Love Nothing)

6. Hit The Switch

7. I Believe In Symmetry - (with Nick Zinner)

8. Devil In The Details - (with Nick Zinner)

9. Ship In A Bottle

10. Light Pollution

11. Theme From Pinata

12. Easy/Lucky/Free - (with Nick Zinner)

 

Durée :50'50

Date de sortie : 25 janvier 2005

 

> Réagir sur le forum musique

 

Plus+

www.saddle-creek.com