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Am X - Kiss & swallow
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Recall/Discograph - 2004
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Avec le temps et les années,
on s’était détaché de tout ce qui avait de près ou
de loin à voir avec un genre apparu quelque part entre
le Maxinquaye de Tricky et le Dummy
de Portishead : le trip-hop. Il faut
dire aussi que les productions commençaient franchement
à s’essouffler. Et pour un RJD2 ou un DJ
Shadow, combien d’insipides albums et de CD au
concept creux a-t-on vu passer, derrière les comptoirs
de maisons même aussi augustes que Mo’ Wax ou Warp,
pionnières du genre? Sneaker Pimps, groupe dont Chris
Corner aka I am X tient les rennes, était
même devenu à mon sens un des groupes étendard de cette descente progressive vers la niche
culturelle réservée à une bande de happy fews mordus
et le parangon de la vacuité du concept.
On avait donc oublié Corner et sa
formation, quelque part après la sortie d’un inutile Bloodsport,
3e album du groupe, quelque part en 2002.
Dans l’attente d’un nouvel opus annoncé, c’est
seul aux commandes de son projet I am X que Chris
Corner décide de venir hanter le devant de la scène.
Et de fort belle façon, force est de l’avouer. Album
minimal, pour ne pas dire minimaliste, kiss & swallow est organisé autour de trois ingrédients
essentiels et faciles à distinguer :
des patterns rythmiques digitaux tout droits échappés
de logiciels tels Rebirth ou Reason, une batterie
martelante et binaire empruntée aux papys Kraftwerk
ou à la scène
de Detroit, et la voix de Corner rocailleuse et
foncièrement sombre; à faire pâlir de jalousie nombre
de groupes rock indé juvéniles. L’ensemble, s’il
ne révolutionne pas loin s’en faut, l’histoire de
la pop électronique, offre un petit morceau de mélancolie
presque gothique mais paradoxalement rythmée: petites
perles de mélodies pop/électro simplistes et
efficaces, cachées derrières un grand voile noir et
triste. Compagnons de ballades solitaires et pédestres
dans un décor post industriel, les 14 titres
parviennent à créer un univers musical particulier, et
un ensemble cohérent qui s’impose à l’écoute
comme un tout… Un album qu’on se surprend à
fredonner bien après l’arrêt du mange-disque
portatif, compagnon de route.
Alors on se prend à imaginer que si Corner avait confié
les parties vocales à Brian Molko, il aurait réussi
le coup d’un Alpinestars bis, partant bille en
tête vers le haut des charts… Mais l’album manque
de ce glamour factice et de cette provocation vocale
dont est capable le leader de Placebo. On imagine
aussi l’avenir qui aurait été réservé à l’album
si Corner avait gonflé le son rock saturé de
ses compositions et confié les patterns aux néo-modèles
du rock garage. Le résultat aurait été un autre de
ces groupes en "The" taillé pour remplir le Zénith
et l’Ancienne Belgique…
Mais il y a chez I am X trop de ce dépouillement
triste dans les compositions lorgnant du côté de Roxy
Music et
de ce passif électronique à l’ancienne pour
convenir à l’énergie sursaturée des nouveaux
groupes à guitare ou des formations qui font du bruit.
Et en fait pour moi c’est très bien comme ça.
Denis
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