M83
- Dead cities, red seas and lost ghosts 1/2
Gooom
Disques/Labels - 2003
Il y a deux ans, une petite révolution
s’opérait dans la sphère musicale française. Alors
que la vague french-touch servait de maître-étalon
pour juger du niveau des bidouilleurs français en matière
de musique électronique, un duo d’antibois hauts
comme trois pommes et bien décidé à imposer leur vision
de choses, sortait, un peu à contre-courant, un disque
mêlant électronica planante et guitares vaporeuses sur
Gooom un label alors en pleine expansion. Faisant
le lien entre Boards of Canada, Tangerine
dream et My Bloody valentine, M83 (du
nom d’une proche galaxie) s’imposait en 2001
comme la révélation musicale de l’année, conforté
en cela par une prestation plus qu’honorable à la
route du rock à Saint-Malo.
Qu’allait-il alors en être du second et toujours périlleux
album, celui de la confirmation ou de la déception ?
Premier constat au bout de quelques
secondes d’écoute, le son si particulier de M83
est toujours là, la texture sonore est restée la même.
Mais cette fois-ci les gamins d’Antibes ont décidé
de mettre les petits plats dans les grands, de pousser
les meubles et d’offrir beaucoup d’espace à leur
musique qui pourtant n’en manquait pas jusqu’alors.
Défiant les lois de la gravité, Anthony Gonzalez et Nicolas Fromageau
ont décidé de se la jouer Burt Bacharach en
combinaison argentée et de booster leurs synthés
vintage pour arriver à un album emprunt d’un lyrisme étonnant
dans lequel des mélodies, plus mélancoliques les unes
que les autres, se bousculent de morceau en morceau.
Jouant véritablement sur l’imagerie 70’s, un peu à
la manière de Daft Punk sur Discovery,
ils convoquent en même temps les génériques de la télévision
des frères Bogdanoff mais aussi les pionniers de
la Library music ou encore Vangelis, François
de Roubaix et autres architectes sonores synthétiques
de l’époque qui se reconnaîtront sans peine sur cet
album.
Rêvant de composer une nouvelle BO à 2001,
Odyssée de l’espace M83 s’approche tout
doucement de son but avec cette collection de titres
intersidéraux qui pourraient aisément servir
d’illustration sonore à un reportage de Michel
Chevalet pour Les Visiteurs du mercredi.
Pas modeste pour un sou et empilant ses couches de guitares
et de vieux synthés embrumés, M83 n’a pas
peur de pêcher par un lyrisme trop appuyé (ce que
beaucoup risquent de leur reprocher) et donne à sa
musique une dimension supplémentaire forcément très
portée vers le 16/9ème et le home cinéma.
Dead cities, red seas and lost ghosts
peut donc être perçu comme un prolongement logique et
nécessaire du précédent (la magie et la surprise en moins), mais aussi
comme le disque du
changement, avec un goût avéré pour les symphonies électroniques
aux accents nostalgiques et tristes. Certains auront
sans doute les yeux mouillés devant tant de mélodies
bouleversantes ; quant aux autres, ils risquent
vite d’être pris de nausées devant cette pâtisserie
sonore qui pourraient bien leur rester sur l’estomac.
Allez
encore une petite part quoi ?
Benoît
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