Tout
a commencé au détour d’une émission de radio
quand j’ai entendu le titre 12 septembre 2001
et ce refrain lancinant immédiatement mémorisé :
"J’avais déjà un flow de taré quand les tours
jumelles se sont effondrées, j’avais déjà un flow
de dingue quand les tours jumelles se sont éteintes."
Le
phrasé en "ligne claire", les mots
tranchants, le discours sans chichi ni clichés, Abd
Al Malik s’impose d’emblée comme un grand parolier
(rappeur ? slammer ?) grâce à un discours intelligent
et intelligible, qui fait du bien, dans un genre où s'est imposé dernièrement
un autre, tout aussi bon : Grand
Corps malade.
D’origine
congolaise, Abd Al Malik passe sa jeunesse entre
Brazzaville et le quartier du Neuhof à Strasbourg et
s’impose très
vite comme un élève brillant (il suit des études de
philosophie et de lettres classiques en parallèle à
ses activités artistiques au sein du collectif
New African Poets) puis se convertit au
soufisme, après avoir été tenté par l’extrémisme
religieux. En 2004, il sort son premier album Le face
à face des cœurs (Atmosphériques) puis un livre Qu’Allah
bénisse la France (Albin Michel).
Avec
ce nouvel album, il met sa foi au service d’un
discours pacifiste et humaniste à travers 15 titres généreux,
sans langue de bois et à des milliers de kilomètres
des clichés et des mauvaises manières récurrentes
chez les rappeurs de base. Un album sur lequel on
retrouve des gens venant d’horizons différents :
Bilal, Mathieu Boogaerts, mais aussi Gérard
Jouannest et Marcel Azzola, l’accordéoniste
attiré de Jacques Brel... auquel, d'ailleurs,
Abd Al Malik fait directement référence dans ses
chansons (les autres, je regarderai pour
toi les étoiles, l’alchimiste,M’effacer)
et qu’il cite comme une de ses principales influences
au même titre que Gil Scott Heron et Al
Green.
Parfait
compromis entre la chanson française traditionnelle et
le rap, Gibralatar raconte des histoires
d’aujourd’hui, d’amour ou de mort, de jeunes de
cités et de paternité (la sienne) avec une simplicité
et une aisance qui impressionne.
Sans
provoc facile et avec une sincérité touchante, sur des
musiques jazzy, blaxpotation ou soul accompagnées par
instant de samples from Keren Ann, Nina
Simone ou Jean Ferrat, Abd Al Malik se
rèvèle
comme un artiste complet et passionnant, doté
d’un flow irrésistible et porteur d’un propos plus
que sensé, auquel on accordera tout notre crédit.
Benoît
Richard
Tracklist
:
01. Gibraltar
02. 12 septembre 2001
03. Soldat de plomb
04. Les autres
05. La gravité
06. Saigne
07. Mourir à 30 ans
08. Le grand frère
09. Il se rêve debout
10. M'effacer
11. Rentrer chez moi
12. Céline
13. Je regarderai pour toi les étoiles
14. L'alchimiste
15. Adam et Eve
Durée
: 54'
Date
de sortie
: mai 2006
Plus+
www.abdalmalik.fr
www.atmospheriques.com
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