Robert le Magnifique, Tepr, My Dog is Gay -
Hamlet
Idwet/La
Baleine - 2004
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« Laissez moi conter au monde qui l’ignore
encore comment ces choses là sont survenues. Vous
entendrez parler dans mon récit d’actes charnels,
sanglants et sans nature. Jugements de hasards, meurtres
fortuits, de morts par ruses ou causes provoquées et
pour finir de desseins que l’erreur fit retomber sur
ceux qui les tramaient. Cela en vérité je peux le dire ».
Voila les quelques phrases qui ouvrent Hamlet, la
mise en musique de la célèbre œuvre de William
Shakespeare par Robert le Magnifique, Tepr
et My dog is gay (les deux membres d’Abstrackt
Keal Agram, dont le nouvel album Bad Thriller
est sorti début avril).
Au-delà
d’une simple démarche musicale, ce projet s’inscrit
dans un véritable projet artistique. Le metteur en scène
David Gauchard souhaitait marier la musique des
trois artistes à la pièce de Shakespeare. De ce
mariage ressort une musique, non pas simplement
illustrative comme souvent, mais qui influe énormément
sur notre perception de la pièce.
Sur fond de hip-hop, d’électro et d’electro-hip hop,
notre trio assure avec brio une interprétation des thèmes
forts de la pièce.
Tantôt
guilleret (Polonius, Guildenstern & Rosencrantz),
parfois calme (Ophélie #1), souvent violent (Le
Duel, Hamlet #3 - le théâtre est l'endroit où je
prendrai la conscience du roi, Ophélie #3 -
l’enterrement), Hamlet mélange les genres et
les ambiances avec une facilité déconcertante.
Etre
ou ne pas être, la question est là, le
premier (vrai) titre du disque est une magnifique synthèse
de l’album : les voix qui ouvrent la chanson sont délicates,
apaisantes. Quelques secondes plus tard la guitare fait
son apparition, accélère le rythme, avant que quelques
scratches ne viennent finir le travail.
Pourtant,
ce premier titre, malgré sa qualité intrinsèque,
n’est qu’une mise ne bouche. Dès Hamlet#1, les
textes font leur apparition. Et c’est à ce moment là
que l’on se rend compte de l’excellence de cet album.
L’adaptation
du texte de Shakespeare (d’après la traduction d’André
Markowicz) sur la musique est en effet le point fort
du disque. Slammer un texte comme celui-ci aurait pu
donner une adaptation des plus étranges, effrayante voire
même vulgaire. Bien au contraire, le talent des trois
artistes rend ce travail tout simplement passionnant.
Hamlet#1 est une montée musicale tout en puissance où le
texte (parfaitement déclamé ici par Nicolas Petitsoff)
prend tout son sens.
Et que
dire d’un morceau comme Le Spectre, chanson étourdissante
de maîtrise et de violence où le père d’Hamlet
explique à ce dernier les raisons de sa mort : texte
slammé, production énorme, pour le meilleur titre de
l’album.
Seule Hier
fait une entorse à la règle. Composée pour les besoins
du disque par Arm (MC de Psykick Lyrikah),
elle n’en reste pas moins en adéquation avec l’album
tant le texte reste dans le même ton que celui de
l’auteur anglais.,
Album concept, Hamlet est vraie et grande réussite,
un de ces albums dont on a plaisir à écouter et réécouter.
Un album indivisible que l’on ne peut écouter que
d’une traite tant chaque chanson amène la suivante.
Finalement,
il ne manque qu’une seule chose : une version vidéo.
Car si Hamlet dans sa version album est un petit
bonheur sonore, le voir marier à la pièce de théâtre
doit être une expérience unique et assez irrésistible.
Olivier
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