Belle
surprise de l'année 2004, le premier album d'Astrïd
(Music for) nous a permis de découvrir une
formation basée à Marseille, pleine de talent et
capable de composer des morceaux riches et profonds comme on
en entend plus de l'autre côté de l'atlantique que par
ici. Une bonne raison de discuter un peu avec Cyril Cecq,
musicien polyvalent ce de groupe fort attachant.
Comment
est née votre formation ?
Vers
la fin de l’année 1996, je rencontre Yvan, qui jouait déjà
dans un autre groupe. Mes projets précédents s’étaient
arrêtés mais j’avais quelques morceaux que je voulais
lui faire entendre. Un ami commun nous présente ; on
parle beaucoup de musique et on décide de jouer ensemble
autour d’un duo guitare/batterie.
Malgré
des goûts musicaux différents au départ, on avait déjà
cette envie de dépasser certains formats (des morceaux
assez longs, des ruptures et une atmosphère assez
tendue).
La
rencontre de Vanina (violon, violoncelle) nous a permis
d’élargir certaines possibilités sonores.
On
a beaucoup joué à trois, à faire des morceaux
instrumentaux autour de la guitare et du violon, mais il
nous manquait d’autres instruments, d’autres sonorités.
On a toujours eu ce soucis de travailler notre son, en
studio comme en séances de travail, et ce goût pour les
instruments et une multitude de timbres, avec cette envie
de jouer d’autres instruments.
La
forme actuelle d’astrïd s’est stabilisée depuis
trois ans avec
l’arrivée de Guillaume, qui pour l’occasion joue
essentiellement de tout ce qui peut ressembler à un
clavier.
D’ou
vient le nom "astrïd" ?
Je
me suis toujours demandé ce que je pourrais bien répondre
à cette question.
En
fait il y a plusieurs raisons :
D’abord il y
a un rapport avec une certaine astrid qui s’est
occupée de l’image des Beatles (costumes et coupe au
bol), ce qui les a lancé vers d’autres envies musicales ;
comme une sorte de chrysalide.
Mais surtout, on
cherchait un nom sans connotation anglaise ou française.
Comment
vous êtes vous dirigé vers ce genre musique ?
Je
dirais que c’est un processus toujours en marche.
Notre
musique a évolué au fil des intervenants dans le groupe,
comme avec le temps.
Histoire de mettre
de côté tout notre passif musical et aller plus en avant
vers une musique plus personnelle (je l’espère).
C’est
aussi un mélange d’influences et de parcours.
Vanina
vient de la musique classique (et surtout baroque), Yvan
est plus jazz, Guillaume tirerait plus vers la musique
folk et rock américaine, quant à moi, je suis plus tourné
vers la musique contemporaine, improvisée ou expérimentale
(pour faire vite).
Et
puis on a eu envie de pouvoir changer d’instruments
suivant les morceaux et donc de jouer différemment en
fonction des instrumentations, de beaucoup s’écouter,
de sentir le silence ; comme une sorte de travail
d’ambiances ou d’atmosphères, ou une tentative de dépeindre
des paysages (sonores)
Vous composez aussi pour la danse
je crois ?
En
fait, on a travaillé avec une chorégraphe (Barbara
Sarreau) sur la création d’un spectacle croisant
des musiciens et des danseurs, dans le même espace scénique.
On a vraiment aimé
cette rencontre, qui amène une autre vision de la représentation
sur scène d’astrïd.
Travailler
avec des danseurs, comme avec des vidéastes, c’est
aussi l’idée que l’on se fait de jouer sur une scène,
face à un public. Disons qu’il y a une envie d’images
sur ou avec notre musique et jouer avec projections ou
avec des danseurs correspond bien avec la musique d’astrïd
et notre vision de la scène.
Quand
on écoute Music for
on pense à des formations telles que les Rachel’s, les
Clogs, le Boxhead ensemble…
En
fait effectivement tous les groupes cités sont des
groupes que nous apprécions, mais il pourrait aussi y
avoir Set fire to flames, Jackie’o’motherfucker
ou encore Mark Hollis ou Town ‘n’ country,
dont on se sent proche de l’approche musicale.
Mais
on écoute aussi beaucoup de musique folk, de jazz et de
musique contemporaine, improvisée ou ambiante des années
70.
Et
je crois que la musique d’astrïd c’est un peu comme
une tentative de mêler les « minimalistes »
contemporains (Arvo Pärt, Philip Glass),
les travaux de Brian Eno, l’improvisation, avec
le passif musical de chacun.
Comment
avez vous été amené à faire la musique du court-métrage de
Guillaume Paturel ?
On
a rencontré Guillaume lorsqu’il faisait le montage de
ces trois courts métrages.
Il recherchait la
musique et a apprécié astrïd. Une simple rencontre par
le biais d’un ami commun. A l’époque, on était
entrain d’enregistrer notre disque et on a poursuivi
dans la continuité sur l’enregistrement de la BO des
trois courts ; au final, il s’agit d’une trilogie
de 60 minutes, ce qui explique la durée du disque.
Music
for est dons autant une musique de film qu’un album
d’astrïd. Nous jouons tous ces morceaux sur ce scène
et ils sont bien le reflet de notre envie de faire une
musique qui peut trouver un prolongement dans des images
(des films, comme de la danse)
Comment
avez vous travaillé sur la fabrication de cette BO ?
On
a d’abord enregistré des morceaux que nous avions déjà
travaillé et prévus d’être sur notre disque. Ces
titres ont été calés sur des scènes dont le montage a
été retravaillé en fonction de la musique, de son
ambiance et du rythme.
Et ensuite on a
vraiment travaillé sur des scènes précises, des génériques
ou des conclusions, comme la recherche d’un thème et
d’une ambiance que l’on retrouve dans les trois films.
Sur
tout ce travail de recherche, Guillaume nous a laissé le
champ libre et faire nos propositions en fonction de
moments dont nous avions convenu ensemble.
On a vraiment
enregistré et procédé comme on le fait pour nos
enregistrements, mais on s’est attaché à ce que la
musique que l’on faisait pour des passages précis
soient le plus neutres possibles. On a plus cherché la
rupture que l’illustration lyrique, comme on le fait
quand on compose pour nous mêmes.
On
est surpris lorsqu’on lit votre bio d’apprendre que
vous venez de Marseille. Votre musique renferme quelque
chose de beaucoup plus froid, moins tourné vers le
soleil que cette ville, si l’on peut dire…
En
fait la ville où l’on vit, Marseille, n’a aucun
incidence sur notre musique ; on ferait la même
chose ailleurs.
On
habite Marseille ou ses environs, nous y apprécions la
vie, mais notre musique n’est ni liée, ni en réaction
à cette ville. On n’est pas des fanatiques de foot ou
de reggae et il n’y a pas forcément un public pour
notre musique, mais on y a un lieu de travail qui nous
permet de jouer et enregistrer de manière complètement
indépendante et autonome.
Sinon,
la musique d’astrïd me semble, au contraire, assez
chaleureuse ; je ne pense pas que nous fassions une
musique froide, certes pas tournée vers le soleil, mais
nous essayons de faire que notre son soit le plus chaud
possible.
Votre
prochain album sera t-il dans la même veine ?
Nous
sommes actuellement en cour d’écriture et nous préparons
le prochain enregistrement. La démarche n’a pas changé,
mais les formes sont différentes.
On poursuit notre
travail sur des pièces acoustiques et ce jeu entre
silence et instruments, où on essaie de ne pas se répéter.
Et puis certaines idées viendront en studio.
Avez
vous des projets parallèles ?
Pendant
longtemps, on en a tous eu. Nous avons toujours partagé
nos lieux de répétition avec d’autres personnes, ce
qui favorise les
échanges. Actuellement, seul Guillaume à son propre
projet de chanson folk (en français), Quaisoir,
dont le disque va bientôt sortir…. à surveiller.
Propos
recueillis par Benoît Richard
-
janvier 2005 -
Plus+
Astrid
> Music for
www.arbouserecordings.com
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