Entretien
avec Thomas Belhom
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Belhom
c'est ton vrai nom ?
Thomas Garnier-belhom
est mon vrai nom. Thomas Belhom" existe
"seul" depuisles Witches Valley (1990),
c'était une idée de Jeremy Prophet, Kim Ohio,et
Naïm Amor.
De
quelle origine es-tu ?
mon
origine est soumarine.
C'est un de mes morceaux préférés (jamais enregistré
sur album) de mon ami Pierre Favard qui joue sur
le disque, de l'orgue cette fois, et très discrètement
sur la version Cd . Sur la version vinyle de Remedios,
il y a un bonus-track lui et moi en duo. A part ça,
j'ai la nationalité française, récemment j'ai appris
que mes origines sembleraient turques...
Pourquoi le projet Amor belhom Duo s'est il arrêté
?
Beaucoup de choses nous séparent désormais. Je
suis avec ma femme, lui avec la sienne, c'est mieux
comme ça.
Que gardes-tu de ces années de collaborations
multiples (Naïm Amor, Calexico...) ?
Je retiens surtout l'amitié profonde que j'ai pour John
Convertino, c'est quelqu'un qui compte pour moi,
pour moi et ma femme, nous avons l'habitude de dîner
tous les quatre avec sa fille pour le nouvel an. Cette
année, je suis en Italie, lui est actuellement en
Nouvelle-Zélande avec Calexico, ça ne se fera
exceptionnellement pas. Au-delà de ça, beaucoup de
concerts des deux cotés de l'Atlantique...
Aujourd'hui tu sors un nouvel album : Remedios.
On a beau l'écouter dans tous les sens, impossible de
le raccorder à un courant musical actuel. Est-ce voulu
de ta part de faire un disque de musiques hybrides assez
intimiste, détachée du son qui te collait à la peau
lors de tes précédents projets ?
Plus généralement, quelle tonalité, quelle couleur
as-tu voulu donner à Remedios ? As-tu voulu
faire passer des émotions particulières ?
Les influences sont diverses, j'ai écouté beaucoup de
disques instrumentaux dans les mois avant
l'enregistrement, du jazz avec Jacques Tollot, Art
Blakey, Joe Jones, mais aussi des groupes de
la scène "post-rock" de Chicago, de Gastr'
del sol à Brockback. Je voulais éviter la
lourdeur des textes que j'entends en général
partout... A part ça, je n'avais pas vraiment de
direction si ce n'est que la situation était totalement
nouvelle, je n'avais pas enregistré en France depuis
longtemps, et me retrouver seul me faisait du bien.
J'avoue que j'ai voulu faire un disque enregistré et
mixé en une semaine, avec une acoustique semi-extérieure,
nous avons donc enregistré l'été au studio Cocoon (près
de Rennes, dans la forêt) dans une pièce où nous
laissions les fenêtres ouvertes. Les morceaux étaient
composés bien sûr avant, mais j'ai en fait tout
improvisé au dernier moment. Ca donne une certaine unité
de temps et d'espace. Le tout s'est révélé très
calme, je ne l'avais pas calculé, je m'aperçois juste
qu'autour de moi, des gens d'âges très éloignés écoutent
ce disque, c'est peut-être lié à ce calme...
mon
prochain album risque d'être différent de ce point de
vue du
moins.
Une des chansons de l'album s'appelle métastase
et fait référence au cancer. Qu'est ce qui t'a inspiré
ce morceau ?
J'ai effectivement perdu ma sœur à cause du
cancer, elle et moi avions dans les dix ans. Mais ce
morceau est une collaboration avec Red qui a
apporté le texte, inspiré par un de ses amis qui est décédé
avant l'enregistrement... Pour moi ce morceau m'évoque
une certaine poésie réaliste française, texte presque
parlé, je ne le trouve pas déprimant, mais plutôt
pictural, abstrait, il n'y a pas vraiment de tempo dans
la musique car la boucle du clavier que j'ai faite
dessus n'est pas stricte. J'ai souvent ce genre de rêves
où nous parlons et des sons, voir des bruits, des
violons soulignent les mots en parlant...
Comment s'est déroulé l'enregistrement de l'album ?
Qui y a participé et de quelle manière ?
Bruno Green écoutait tout ce que je proposais et à
m'aidait à faire au plus simple, Red était là
aussi, très disponible pour apporter des idées. Pierre
Favard est passé aussi, Gilles Costantini
m'a beaucoup aidé sur les arrangements violons... mais
celui qui m'a impressionné, c'est David Grubbs.
Il construit très précisément tout ce qu'il improvise
et dans la vitesse. Je veux dire aussi que Stéphane,
Anne du label Ici D'ailleurs sont venus au
studio et me soutenaient.
Sur scène tu es seul, Tu joues de la batterie et tu
samples tes
instruments qui sont aussi divers que variés. Pourquoi
ce choix radical ? Tu ne t'emmêles jamais les pinceaux
dans tout ce bric-à-brac ?
Emmêler les pinceaux, c'est une très belle
expression. Viva Yazon et moi sommes arrivés ici
en France pendant la tournée Miossec. Nous
arrivions de Tucson où j'avais commencé à travailler
sur mon solo "live", mais là je jouais avec amorbelhomduo.
Il y avait vraiment de quoi s"emmêler les
pinceaux". Je me suis créé un espace de liberté
avec mes instruments, ce n'est pas toujours parfait mais
il y a des surprises à coup sûr, autant pour moi que
pour le public. Jouer seul est relativement nouveau, à
l'époque de Génération Chaos, nous pouvions être
18 sur scène !
Envisages-tu d'incorporer d'autres musiciens sur scène
avec toi lors de ta prochaine tournée ?
Pas vraiment sur celle-là, mais par la suite oui.
Sur le fond de la scène, durant ton set, on voit des
reproductions de peintures projetées, peux-tu nous en
dire plus ?
Ce sont des peintures de Viva Yazon, peintre américaine
d'origine
Philippine, peintures à l'huile essentiellement
(quoique aussi collages...)
que l'on retrouve aussi sur la pochette de Remedios
mon dernier album. On pourra voir son travail sur www.thomasbelhom.com
dans les jours qui viennent. Je pense que ses
peintures sont fabuleuses parce qu'elles contiennent à
la fois de la précision et beaucoup d'intuition. Les
peintures sur scène sont en majorité des villes, des
architectures de lieux qu'elle imaginait à l'époque où,
en tant que philippine, elle avait vraiment des problèmes
(avec l'immigration française) pour venir ici. Ce sont
souvent des villes européennes qu'elle imaginait
d’ailleurs. Maintenant que nous y sommes, ça me plait
beaucoup de les montrer dans des villes en Europe.
Tu entames une tournée en février je crois ? La scène
est-il quelque chose de fondamentale pour toi ou
pourrais-tu te contenter de sortir des disques
simplement, comme de plus en plus de groupes, liés à
des micro-structures et aux moyens limités, le font ?
je ne pense pas que les artistes sur les
"petites structures" peuvent se
passer du "live", en tout cas, pour moi, c'est
effectivement lié aussi à un équilibre, et puis je
cherche toujours une maison pour me poser, quelque part
à nouveau. J'aime tourner et voir du pays, des amis. Le
travail sur scène est très exigeant, je ne cesse de me
préparer... car je suis seul, dois conduire, etc... même
si maintenant je peux vraiment compter sur le label
"Ici D'ailleurs" qui sont des gens rares et précieux
dans le contexte de la musique actuelle.
En janvier, je suis un peu en Suisse, notamment avec Red,
en février, je serais à Tucson, puis en tournée en
France en mars et en avril en Allemagne.
Propos recueillis par Benoît
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décembre 2003 -
www.thomasbelhom.com
http://www.icidailleurs.com
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