Alain
Bashung - L'imprudence
Barclay/Universal
- 2002
On n’entre dans pas dans le nouveau
Bashung comme dans un moulin, l’oreille distraite et
un livre à la main. L’approche se fait consciencieuse,
en prenant le temps de savourer l’une après
l’autre les superbes chansons qui parsèment L’imprudence
le temps de 66 minutes de bonheur. Comme à l’opéra,
on peut écouter l’album avec le très beau livret qui
accompagne le disque afin de s’imprégner aux mieux
des textes à la fois poétiques et mystérieux
de Jean Fauque, parolier attitré de Bashung
depuis quelques années.
Avec une superbe photo style fin XIXème en couverture,
Bashung annonce la couleur : noire. Car ici tout
est noir, tout dans cet album semble inscrit sous le
signe du corbeau. Après une Fantaisie Militaire,
il y a quatre ans, déjà incroyablement osée, Bashung
nous surprend et nous envoûte une nouvelle fois, avec
une structure musicale complexe et hors-norme pour un
artiste de chanson française. Mais lorsque l’on connaît
le parcours du bonhomme depuis quelques années on ne
sera pas surpris d’entendre des chansons si particulières
et si travaillées chez un artiste pour qui le
non-conformisme a souvent été une marque de fabrique.
Alors comment ne pas succomber aux
charmes sombres et romantiques de chansons telles que faites
monter formidable bande annonce de l’album ou
encore tel ouverture parfaite et arrangements
superbes pour un album qui n’en finit jamais de dévoiler
sa richesse au fil des écoutes. On n’oubliera pas Je
me dore que l’on jurerait arrangée par
Craig Armstrong ou encore Mes bras, sans doute le
plus beau texte de cet album porté par des arrangements
baroques et mystiques à la fois.
Bashung inquiète, Bashung fascine, et plus l’album
avance et plus on semble s’enfoncer dans son univers ténébreux
avec des chansons qui se font plus opaques, plus
troubles encore Faisons
envie, plus mélancoliques Le dimanche à
Tchernobyl ou encore cette ode étrange à
Mari-Jo Pérec intitulée Dans la foule.
Bref, Bashung nous étonne et nous désoriente
à chaque plage, et on termine l’album presque à bout
de souffle, et l'artiste lui, reprend les choses là où
elles avaient commencé avec, en conclusion, une
magnifique variation sur Tel (le premier morceau de
l’album) intitulée tout simplement L’imprudence.
Alors combien faudra-t-il d’écoutes pour saisir véritablement
toute la force et la puissance de ce disque, combien d’heures avant de
se dire : "ça y est je le tiens !" Je n’en sais rien
mais tout ce que je sais c’est que l’imprudence
serait de passer à côté de cet album majeur.
Benoît
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