Bonnie
Prince Billy - Master
and everyone
Domino
records - 2003
Neuf albums en dix ans, sans compter les collaboration et
les mini-albums sortis ici ou là, il n’y a pas de
doute Will Oldham avance à pas de géants dans
la musique country-folk sur laquelle il semble laisser
une emprunte de plus en plus large et profonde.
Palace Brothers, Palace
Music, Palace tout court, ou Bonnie Prince
Billy aujourd'hui, les pseudonymes ne manquent pas
pour un Will Oldham qui semble vouloir à chaque
fois redéfinir les limites de la musique qu’il joue.
Et même si ce Master and everyone
semble à première vue bien sage et à des kilomètres
de la country rêche et lo-fi d’un Arise therefore
il n’en est pas moins un album brut et à
l’imaginaire fortement développé.
Enregistré live et en quelques prises, ce nouvel album évoque,
dès les premiers morceaux, les grands espaces américains,
les feux de camps au clair de lune, le tabac à pipe et
les chevaux au repos, un peu à la manière d’un Johnny
Cash sur ses derniers albums. Composé de balades superbes, dépourvues de toute
batterie, Master and everyone nous promène à dos de cheval dans un décor
de western proche de celui du Dead man de Jarmush.
Epuré, dépouillé à
souhait par rapport aux précédents albums de Bonnie
prince Billy, Master and everyone semble se
rapprocher de plus en plus de la musique contemplative
de Nick Drake ou de Smog sur The doctor
came at down sans toutefois sombrer dans la
grandiloquence et avec une retenue et une humilité
touchante pour un homme à la carrière déjà bien
entamée.
En duo comme sur Aint You Wealthy, Maundering,
Hard Life, Lessons From Whats Poo ou
Wolf Among Wolves ou bien seul comme sur les autres
chansons, Will Oldham s’interroge et philosophe
sur la vie en jouant quelques arpèges de guitare accompagnés
parcimonieusement du violoncelle ou de l’orgue.
L'album terminé, on imagine Will Oldham enfiler sa peau de bête,
remettre son
chapeau stetson et repartir sur les chemins escarpés
des montagnes rocheuses de l’Amérique profonde et
silencieuse.
Moins sombre, moins obscur
qu’auparavant, la musique de Will Oldham s’éclaircit
tout doucement et laisse entrevoir la lumière qui rime
ici avec douceur et plénitude musicale. Alors disque de
la rupture, disque du changement ou simple passage
d’une vague de calme avant le retour à des choses
plus sombres et
plus râpeuses ? La suite des aventures
de Bonnie prince Billy très bientôt dans vos
bacs.
Benoît
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