musique

Lars Horntveth - Pooka    

Smalltown supersound/Chronowax - 2004

 

 

 

    Quand il n’officie pas seul sous son patronyme à la ville, Lars Horntveth est repérable  au sein de la formation Jagga jazzist, responsable depuis 1996 (Lars a 14 ans à l’époque) d’un renouveau du jazz nordique, revu à la sauce électronique. Une sauce électronique qui ne se sert pas uniquement des loops d’inspiration Jazz pour créer des pièces novatrices, mais qui instille plutôt les potentiels des machines dans les suites jazz habituelles. Un crossover à contre sens de la norme habituelle, qui a séduit le label Ninja Tune, qui signe le dernier album en date, après une diffusion « all over the world » par Smalltown supersound.

 

    L’album solo de Horntveth n’est pas qu’un interlude dans l’attente du prochain Ninja Tunien album des Norvégiens. Bien sûr on y retrouve les éléments phares de sa formation d’origine : ce jazz imprégné des premiers frimas de l’automne, (la fraîcheur des fjords ?) tout en retenue et à la limite de la mélancolie. Un jazz soutenu par l’électronique qui lorgne plus du côté de Miles Davis façon kind of blue ou in a silent way que de la fusion de Coltrane ou Hancock,  mise au goût du jour plus tôt cette année par les français de B.L.A.S.T.

 

    Un crossover jazz-électronique qu’Horntveth construit inlassablement selon la même structure, sans pourtant jamais céder à la répétition. Une trituration rythmique sert de tapis sonore à l’expérience « live » des instruments analogiques. Un instrument soliste initie chaque morceau dans une solitude relative puis d’autres viennent qui lui répondent et jouent au chat et à la souris. Horntveth y laisse régner en maître les saxo alto et basse, la contrebasse en sourdine et exceptionnellement la guitare énergique. Des cordes façon grand orchestre sans écho finissent invariablement par pointer le bout de leur puissance, soutenues souvent par une nappe électronique qui monte crescendo. Horntveth en parfait amateur de jazz, ne manque pas, par ailleurs, de faire réapparaître la même ligne mélodique de ci de là au fil de l’album, en gimmick réinventé.

 

    Si Pooka n’est novateur en rien, ni révolutionnaire d’un genre musical crossover, qui a fini de céder à l’expérience depuis bien longtemps;  il apporte pourtant une grande sérénité et un apaisement serein de dimanche après-midi au salon… Quand par désœuvrement, on se prend à se moquer des passants qui se mouillent au dehors, ou qu’on reste bloqué devant le trajet sinueux d’un goutte écrasée sur la fenêtre à front de rue. Une atmosphère distillée, condensée, qui mélange l’efficacité sonore du jazz et des instruments à la faconde rythmique de l’électronique. Un mélange construit et travaillé, bande son des dimanches après-midi, dont la construction en spirale excentrique rappelle étrangement les bandes originales de film. Non pas l’exagération des cordes diluviennes qui émaillent les superproductions cherchant à compenser par l’audition, l’intensité qui manque par l’image. Plutôt la bande sonore d’un film asiatique à rebondissements. Une musique qui se servirait de l’évocation esthétique de l’image pour servir le dessein sonore ; image qui se trouverait complétée et enrichie émotionnellement par le passage d’une musique ciselée, qui s’adresse immédiatement aux sens plutôt qu’aux sémantiques convenues.

 

    Une réussite intimiste, un petit bout de gemme sans esbroufe ni clinquant… qui finit par s’imposer au fil des écoutes circonspectes et dominicales.

 

Denis Verloes

 

durée:   46’ 03

date de sortie : 30 août 2004

 

Tracklist:

01. Pooka
02.
The Joker
03. Mars Bar (Call for Gary)
04. Tics
05. Kahlua Blues
06. News On The March
07. 1.Lesson In Violin
08.
Pooka Soundtrack

 

Plus +

www.smalltownsupersound.com

le site de Pooka

Jaga Jazzist : a livingroom hush