On
se doutait bien que Katerine
était fou. Si si. Ses dernières
productions nous le laissaient présager avec pour
oriflamme de folie absolue, le binôme les
créatures et l’homme à trois mains. On croyait,
dans ce semi délire, déceler ce que serait le Katerine
du 21e siècle : mis à nu sur la pochette,
mis à nu sur quatre pistes à la guitare et dans les
paroles trop réelles ou trop sibyllines de ses derniers
opus. Katerine
serait une sorte de mélange entre Mallarmé
et Ferré,
capable de plaquer ses textes très loins,
très proches, sur des mélodies mi-pop mi-folk dont les
gimmicks entêtants auraient sans doute été adoubés
par Gainsbourg
- ou d’ailleurs par les pontes des slogans
publicitaires à la télévision.
Son
précédent opus 8e
ciel semblait suivre cette veine. On croyait ne pas
s’être trompé. Et bing ! voilà
ti pas que Katerine
enfile le col roulé en lycra rose et la culotte blanche
de ballerine et qu’il se prétend « robot après
tout », prenant à revers le discours des Daft
Punk, qui eux prônaient juste le contraire. Esprit
de contradiction il travaille les arrangements… aux
manettes de machines. Philippe
Katerine étoffe sa compétence
informatique et ses bidouilles électroniques
(apprentissage avant l’album avec Renaud
Letang et
Gonzales, excusez du
peu), quand la mode est à la guitare et au punk à
trois accords. Adieu bossa, gentille easy-listening,
folk d’outre tombe en beau costard violet dans lequel
on avait appris à l’aimer. Non Katerine
est le fou sur la colline et c’est en Dj
improbable et
encore plus nu qu’avant qu’il nous revient : ne
cherchez pas comment c’est possible, c’est une image !
Sa voix atone fait mouche en cousin déjanté et moins
manipulateur du HAL de 2001
odyssée de l’espace.
C’est
du haut de son balcon sur le monde, en démiurge atteint
d’ébriété à l’antique qu’il assène de
petites bombes musicales. Bombes parce que l’air de
rien avec deux bout de ficelles : ici un gimmick,
la un clap, là une mélodie vocale, il parvient à
rendre indispensables la majorité des plages de son
album. A ce titre, on vous met au défi de résister aux
cousins synthétiques de je
vous emmerde que sont Louxor
j’adore ou 100%
VIP. Cocktails molotov
d’intention aussi, parce que dans un monde qui réhabilite
le blouson de cuir et le t shirt
rayé, dans un monde où pour s’afficher en tête des
magazines il faut s’écrouler sur scène ou sortir
avec Kate Moss, Katerine
arrive avec ironie et pied de nez à se faire plus punk
que les punks. Dandy ultime, ses titres sont des
crachats classe jetés à la tête du monde. Mais des
crachats quand même… et plutôt baveux encore bien.
Des bombes sales aussi, parce que ses chansons nous égratignent.
Philippe Katerine
est aujourd’hui le seul artiste français de notre
connaissance, capable de croquer avec ironie moqueuse,
second degré et air narquois, nos petits travers, nos hédonismes
vains, nos craintes collectives et nos stupeurs
politiques. Qui d’autre que lui est capable
aujourd’hui d’évoquer ses frères humains en Villon
du 21e siècle, l’éjaculation précoce
sans tabou ni misérabilisme, la tentation par le vide
qu’est la jet set, les moments de néant quotidien, et
provoquer la répulsion inconditionnelle pour Marine
Le Pen, sans même
toucher un mot de la politique du FN.
Objet
musical non identifié, publié de surcroît chez une
major (pied de nez ultime ?), le Robots
après tout de Philippe
Katerine est une réussite
du dernier trimestre 2005, qui n’en finit pas de
revenir et revenir et revenir encore sur notre platine
au mois de janvier 2006, et sans doute la réussite pop
française la plus efficace de ce début de siècle.
Denis
Verloes
Tracklist
:
01.
Etres Humains
02.
Borderline
03.
Numéros
04.
Le. train de 19h
05.
Louxor j'adore
06.
Le. 20-04-2005
07.
Titanic
08.
100%. VIP
09.
Patati Patata !
10.
Excuse-moi
11.
Qu'est-ce qu'il a dit ?
12.
78-2008
13.
Après moi
14.
11 Septembre
Durée
: 41'03
Date
de sortie : octobre
2005
Plus+
www.katerine.net
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