musique

The Constantines - Shine a light

Subpop/chronowax - 2004

 

 
 

    Le hasard fait parfois mal les choses. Le hasard ou l’opportunisme des labels, d’ailleurs. En 2001, The Constantines faisait les beaux jours des radios étudiantes outre-Atlantique, avec son premier album The constantines. A l’époque, le monde venait à peine de découvrir le néo-garage, et on se pâmait à peine devant la remise en avant des blousons de cuir et des cheveux ébouriffés . On ne connaissait pas encore Black Rebel Motorcycle Club, ni les Kings of leon. Assurément, on aurait connu les Constantines à l’époque, on aurait vite fait notre coqueluche de ce groupe simplement rock, simplement et efficacement bruyant et « sale ». Malheureusement pour eux, il aura fallu attendre l’arrivée d’un second album chez Subpop, diffusé mondialement, pour que la musique du shine a light de Toronto, parvienne à nos oreilles. En plein au moment où on se mange une déferlante de groupe en « The », tous plus rock les uns que les autres, tous plus clichés les uns que les autres, plus dispensables aussi, parfois.

 

    Alors on mesure Constantines à l’aune des autres groupes, et on trouve le «next big thing» en provenance de Guelph en Ontario, un peu moins original que ce qu’on pourrait. On est plus durs avec eux, et on sait qu’on ne devrait pas. Car point ici de « copiage », mais plutôt hasard de calendrier.  Si les Kings of Leon sont la réponse lower class aux intellos de New York version Strokes, les Constantines incarnent quant à eux la version pierre brute, mal dégrossie, entière et totalement sincère du garage rock façon Canada. Le jeu de guitare rappelle inévitablement Fugazzi, groupe inspirateur, pour lequel les Constantines ne cachent pas leur allégeance. La structure des couplets est plutôt traditionnelle. Les Constantines ne recherchent pas… Ils éructent leur vision noire de la société et du monde. Ils foncent toutes cordes dehors. Les deux guitares qui hésitent d’ailleurs toujours, au fil de l’album, entre mur du son en pleine poire et mélodie affinées au son du clavier récemment adjoint au groupe. Entre sagesse et arrogance. Jamais le groupe ne cède au gimmick racoleur qui ouvre de facto la porte de MTV. Pourtant, le résultat s’avère diablement efficace. Du rock, irrévérencieux et bête comme il était d’usage avant qu’on l’intellectualise. Du rock qui puise dans les racines du style musical, mais ne néglige pas non plus les apports en sonorités testés au début des années ‘90. La voix de Bry Webb, chanteur et guitariste de son état, rappelle les nuits enfumées et les bars où l’on boit plus que de raison. On ne peut s’empêcher de rapprocher les sonorités de cette voix avec celle de Joe Strummer ou de Springsteen, souvent cités en référence au groupe. Il a ces inflexions chargées d’excès qui saliraient la plus belles des mélodies et transformeraient n’importe quel hymne pop en rock à poils durs. Engageant, énergique et féroce. Vraiment. Et follement nostalgique aussi, un peu.

 

    Le seul défaut de l’album, pour autant que la redondance soit un défaut, est son retard à percuter nos oreilles. Le style a désormais trouvé ses nouveau mètres étalon, façon années 2000, et il devient très difficile de séduire un « grand public » désormais ré-habitué à entendre du rock qui frappe. Alors, oui, il manque sans doute a shine a light l’un ou l’autre hymne à reprendre à tue-tête ou en sonnerie de téléphone mobile, mais l’électricité, la tension et la rage elles sont bel et bien présentes. On espère que l’album séduira aussi quelques égarés, comme votre serviteur, en plus des aficionados acquis à la cause du néo-rock.

 

Denis