The
Thrills - So
much For the City
Virgin - 2003
L’histoire est désormais bien connue : piétinant
dans leur brit-pop réglementaire et sans réelle
saveur, les Irlandais de The Thrills se décident
en 1999 pour un séjour de quelques mois en Californie,
plus précisément San Diego. Là-bas, Conor Deasy
et ses 4 camarades (re)découvrent les Beach Boys,
les Byrds, la “cosmic american music” de Gram
Parsons, et n’en reviennent littéralement pas :
de manière aussi naïve que touchante, ils multiplient
les références aux lieux qui les ont touchés (San
Diego mais aussi Santa Cruz, Big Sur, Las Vegas), comme
si le simple fait de les nommer suffisait à leur donner
une réalité. Qui sera pour eux dès lors bien différente,
car voilà les Thrills transfigurés, transformés
par leur tutoiement de cet American Dream peuplé de
cow-boys hippies. Accessoirement ils se voient soudain
propulsés sur le devant de la scène par un Morrissey
toujours altruiste et conquis par leurs premiers
singles.
Hier pauvres hères traînant leur ennui du côté de Cork et Dublin, les
voici machine à tubes en or massif, susceptibles même
de décrocher la timbale en lieu et place de leurs collègues
américains : on songe ainsi énormément à la
country-pop gracile de Beachwood Sparks (Say
It Ain’t So) qui doivent se sentir tout d’un
coup nettement moins seuls dans leurs t-shirts des Stones
circa 1973 et leurs jeans élimés. Pedal-steel, banjo
millésimé, chœurs en pamoîson (One Horse Town),
mélodies renversantes, arrangements de haute volée
(les violons bacharachiens de Old Friends, New Lovers),
ce premier album providentiel est rempli à ras bord des
ingrédients qui ont fait, font et feront les riches
heures d’une pop west-coast sensible et inspirée.
Mais si la pochette (et accessoirement leur look en général) plagie
celle du Gilded Palace of Sin des Flyin’
Burrito Bros, les Thrills ont eu
l’intelligence de ne pas se laisser tomber dans un
puits passéiste duquel ils pourraient avoir toutes les
peines à sortir, en confiant la production à Tony
Hoffer. Ce très funky californien pur jus, déjà
remarqué auprès de Beck ou Air, et qui
avait également envoyé Supergrass dans
l’espace sur leur très réussi Life on Other
Planets, réussit de manière très subtile à préserver
l’amour du groupe pour les sons vintage et rétro,
tout en les inscrivant absolument dans leur époque grâce
à une production puissante et limpide.
Ses sons de claviers et autres bruitages d’un psychédélisme élégant
s’accordent ainsi à merveille à cette musique à la
fois terrienne (le legs country) et d’une légèreté
à toute épreuve (l’amour de la pop) qui fait de So
Much For the City le disque parfait pour passer l’été
au frais le sourire au lèvres.
Laurent
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