musique

[Melk] - Super 81/2

Un dimanche - 2004

 

 

 

    En général, quand la chronique d’un album présente les différentes facettes d’un groupe touche à tout, le lecteur est en droit d’imaginer qu’on est en présence d’une formation à l’aube de sa carrière, encore en pleine recherche d’identité artistique, explorant différentes contrées musicales, plein de fougue, mais faute d’une ligne directrice personnelle toute tracée. Groupe nouveau venu, ou pire… "formation-rateau" ratissant tellement large que l’album ne peut plus déplaire à personne, pas plus qu’il ne suscite un enthousiasme démesuré d’un quelconque auditeur.

 

    Une première écoute de super 8 (film muet au charme suranné autant qu’artie soit dit en passant), deuxième album des Grenoblois de [Melk] a tôt fait de détromper les auditeurs sur les deux précédentes affirmations.  [Melk] se connaît, et même plutôt bien. Il enfonce son propre sillon dans ce deuxième album.  Et quand [Melk] se met à titiller l’électro-pop sur queen of a day ou othello, la pop ritournelle de confiseur sur love is a soap opera, le rock rauque et encore glabre sur mobile, les ambiances lugubres de monologue, l’éther d’in a train ou l’électronique élimée sur astéroïde…. Force est de constater qu’on a ni affaire à un plan marketing enjôleur ni à un cheminement aléatoire, mais bien à une ligne directrice musicale établie, éclectique, mais dont les rennes sont tenues de main de maître par les membres du groupe.

 

    Un [Melk] en pleine maîtrise dont fait d’ailleurs partie un Etienne Dos Santos auteur il y a une paire d’années avec sa formation Rien, d’un requiem pour des baroqueux de haute volée, faisant là aussi la part belle aux ambiances et à la construction musicale en volutes. Construction onirique au cordeau qu’on retrouve aussi sur ce super 8, où rien n’est laissé à l’avenant, pour aboutir à ce mélange de haute précision. Chaque instant musical, chaque choc analogique/numérique est réfléchi, retaillé, masterisé, maîtrisé et déposé exactement là où il faut pour créer l’ambiance ou le hiatus adéquat.  Rarement un groupe qui fait feu de tout bois sur une ligne musicale qui va de la dance au post rock en passant par l’électro  et les différents jalons du rock et de la pop n’aura réussi à créer un tel univers, unique, aérien, riche d’arrangements originaux, plein de réflexion, sans tomber dans aucun des travers intellectualistes auxquels on pouvait s’attendre ni aucun des alambics  expérimentaux de la musique indépendante.

 

    Le résultat s’écoute d’une traite comme un voyage de terreur et de rêve d’une Alice qui a traversé le miroir est commence à s’en mordre les doigts. Impression de fragilité, d’hésitation et de candeur, dans un univers de haute précision. La voix de Sabrina Masella conforte cet étrange ressenti (voilà le seul endroit ou  [Melk]  hésite), de son timbre qui fait songer à Alysson Shaw des Cranes ou au premier et dernier opus de Dubstar. Enfance, songe, anglais hésitant, français litanique, la voix ajoute à l’atmosphère mais risque pourtant de lasser quelques amateurs de passage. Votre serviteur quant à lui, est définitivement conquis.

 

Denis Verloes

 

Tracklist :

01. Queen for a day

02. Othello

03. La veille

04.Love is a soap opera

05. L’asteroïde (part I)

06. L’asteroïde (part II)

07. love went to a party

08. Monologues

09. Aux armes

10. Mobile

11. In a train

12. Dolorès

 

durée : 43’ 36’’  

date de sortie : 26 avril 2004

 

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