Hommage
à la pop culture pré-rock, Les Chroniques d’Oliver
Alban de Floc’h et Rivière s’inscrit
dans la lignée anglophile d’une œuvre dont
l’axe central pourrait bien être Blitz,
exercice parfaitement réussi de mise en abîme, via
la bande dessinée, de la résistance anglaise aux
bombardements nazis. Abîme dans l’abîme, le vrai
faux Oliver Alban (couverture secrète du couple
Sturgess/Albany) ne trompe personne : c’est
le cheval de Troie à l’intérieur duquel – mal
dissimulés – Floc’h et Rivière
s’inventent une légitimité de britanniques pur
jus ; la porte donnant accès à leurs rêves
les plus fous.
On
les retrouve donc à travers ce personnage sans aspérités,
d’un naturel dont la
transparence est une arme car les célébrités
s’y contemplent à loisir comme dans un miroir et
nous offrent au passage quelques intimités
bienvenues : Alcoolisme, homosexualité,
misogynie – tout ce qui pouvait échapper en somme
aux portraits officiels des rois de la culture
anglaise du XXème siècle. Aucune révélation à
attendre, là n’est pas le sujet. Ce name-dropping
de l’aristocratie culturelle british débouche
tout au moins sur l’apologie d’un certain art de
vivre, tea time et décoration intérieure
(on en frémit d’avance), tout au plus sur une réflexion
assez mature quant à la pénétration impossible
des arcanes de la création artistique. Entre les
deux, sujet central, s’ouvrent, dans une
distanciation sans complaisance, les failles et les
trous noirs d’existences pas si roses.
C’est
tout le paradoxe de ces trente-neuf textes, disposés
comme autant de marches au podium d’un palmarès
populaire – Ian Fleming, Somerset Maugham,
Patricia Highsmith, John Gielgud, Alfred Hitchcock,
Rex Harrison, Cole Porter, Natalie Wood, Truman
Capote, Gilbert and George, Rudyard Kipling, André
Maurois ( !), Noël Coward, etc.. Dans un geste
plutôt conciliateur, Floc’h et Rivière
allient en effet le sujet britannique à la
tradition frenchy du style léger. In fine,
l’amertume de fond, matériau cette fois anglais,
se trouve enrobée dans une dignité formelle propre
au matériau français. Inversement de tendance
inattendu qui prouve, sinon la conciliation possible
des ennemis historiques, la complexité pour le
moins jouissive du travail littéraire.
Christophe
Malléjac
Date
de publication : 17 août 2006
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Floc’h
& Rivière
- Olivia Sturgess 1914-2004
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