roman

Véronique Goavec - corps insulaires  1/2

Labor/Collection Théglacé - 2004

 

 

 

    Parce que l’action se déroule dans une île grecque, probablement Mykonos, en plein été, parce qu’il y est question de drague et de rencontres frivoles, on serait tenté de considérer le premier roman de Véronique Goavec avec légèreté ou peu d’intérêt. A tort, car Corps insulaires mérite mieux qu’une lecture approximative. Le décor paradisiaque et l’apparente superficialité des personnages n’enlèvent rien au déroulement tragique de l’histoire, et à ses conséquences sur la vie même de ces derniers.

 

    En effet, Véra lesbienne affranchie partie rejoindre son ami Guillaume lui-même homo qui lui a proposé un hébergement dans la maison de Louis, son frère alcoolique et catholique, pense profiter pleinement des possibilités offertes par l’ île. Hélas, tout ne se passe comme prévu : d’abord Louis, renfermé et ronchon, macho avec sa jeune femme Pilar, réserve un accueil mitigé à Véra. Ensuite celle-ci après une aventure avec une Américaine se lasse vite des plaisirs artificiels et ambitionne de rejoindre le groupe des Américaines dans une autre île. Alors que les deux frères quittent la maison pour un congrès d’ archéologie, Véra voit soudain ses projets contrariés par Pilar, nettement moins sauvage et timide qu’en présence de son mari.

Véronique Goavec, jusqu’ ici réalisatrice de décors de théâtre et d’ opéra, livre un premier roman frais qui balaie énergiquement les idées reçues et revitalise l’ effet de surprise. Ou comment une chose arrive quand on ne l’attend pas. Elle prône ainsi une certaine idée de la curiosité et du refus de l’a priori.

Le roman évoque aussi en filigrane la liberté toute relative de la minorité gay, même dans une île dont les opportunités lui sont entièrement dédiées. Ce qui n’ induit pas forcément le consentement tacite des autochtones, comme le groupe d’amis de Pilar notamment.

 

    A quelques semaines de l’été et des vacances, ce court récit peut constituer un moyen d’attente tout à fait agréable. Malgré un début très convenu, dans lequel l’ auteur ne nous épargne pas les clichés présentés dans un style peu emballant – la syntaxe mise à mal avec le mélange perpétuel du présent et de l’ imparfait - , Corps insulaires, lorsqu’il prend son envol avec la relation entre Véra et Pilar, devient plus séduisant. Parce qu’il révèle une Véra beaucoup moins attendue et superficielle, qui accepte d’ être déstabilisée et d’ ouvrir son âme. Et par là-même une jeune auteur acerbe et percutante, observatrice lucide et amusée de la nature humaine.

 

Patrick

 

Editions Labor

Quai du Commerce, 29

1000 Bruxelles

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