1949,
au Texas. La vie de John Grady Cole, adolescent
passionné de chevaux, bascule lorsque le ranch où
il a grandit, ne s’avérant plus rentable dans une
Amérique d’après-guerre en pleine mutation économique
et sociale, doit être mis en vente. Il décide
alors de partir vers le Mexique, où il espère
pouvoir réaliser ses rêves de grands espaces et de
communion avec les chevaux. Entraînant un ami dans
sa chevauchée à travers le Texas, ils trouvent du
travail dans une hacienda mexicaine, jusqu’à ce
que John Grady et la fille du propriétaire entament
une liaison secrète. Le prix à payer en sera élevé ;
arrêtés et jetés en prison sous un faux prétexte,
ils y feront tous deux les frais d’une violence
particulièrement cruelle. Lorsqu’ils parviennent
à en sortir, leur rêve mexicain d’étendues
sauvages et de justice s’est évanoui, et ils
n’ont d’autre choix que de retourner là d’où
ils sont venus.
Ce
livre profond et dense se mérite. Les difficultés
de compréhension initiales dues à la forme
particulière du roman, (les dialogues sont insérés
dans le récit sans tirets ni guillemets, au lecteur
de s’y retrouver) sont balayées en peu de temps ;
on se laisse envoûter par cette histoire
d’aspirants cow-boys paumés dans une Amérique
grandie trop vite, à la recherche d’un monde
sauvage qui n’existe plus que dans la mémoire des
anciens. Un lent western, tout en images, celles des
contrées de l’ouest américain que traversent les
deux personnages, au rythme balancé des chevaux,
« âmes ardentes » autour desquelles
s’articule tout le récit. « Ce qu’il
aimait chez les chevaux, c’était ce qu’il
aimait chez les humains, le sang et la chaleur du
sang qui les animait. Toute sa déférence et toute
sa tendresse et toutes les aspirations de sa vie
allaient aux âmes ardentes et il en serait toujours
ainsi et jamais autrement. »
Dans
la lignée d’auteurs tels que Richard Brautigan ou
Jim Harrisson, on retrouve ici ce vieux rêve américain
des grands espaces, la nostalgie tenace d’une
terre vierge de toute souillure moderne, où évoluent
des hommes taciturnes et anonymes, infortunés héritiers
d’une époque qui s’achève. Une mélancolie indéfinissable
s’élève de ce récit, celle des illusions broyées
par l'inflexibilité d’un destin contraire. Mais
dont on sort vivant, désillusionné, certes, mais
certainement un peu plus fort.
Ce
livre a obtenu, en 1992, le National Book Award. Les
auteurs américains capables de nous faire rêver de
paradis perdus, d’immenses prairies où galopent
des chevaux sauvages, se font rares, de nos jours,
celui-ci est encore vivant, ce serait dommage de le
rater.
Isabelle
Meursault
Date de
parution : 1998
>
Réagir
sur le forum Livres
|