Sous une belle couverture couleur fraise pétant, se cache
et se découvre un roman assez bref hélas beaucoup
moins pétant… une sorte de non-histoire, deux
personnages principaux à peine ébauchés et un
propos dont l’ambition et le sens m’échappent
totalement ou en tout cas ne trouvent pas chez moi
de résonance particulière.
Un garçon et une fille, amis
d’enfance qui se donnent mutuellement du "Mon
Vieux" avec une volonté de mélanger les
genres ou de semer le trouble quant à la nature de
leur relation : amitié, amour ??? Mais
c’est la fille qui tient ici la plume. Elle bosse
dans une agence de pub pour laquelle elle doit
trouver des slogans vendeurs. Elle juge ce boulot
alimentaire avec humour et distanciation mais
celui-ci lui permet d’être aussi dans le monde
contemporain de la consommation à tout va. Alors en
parallèle de cette activité lucrative, elle écrit
un roman autobiographique, au détail près que tout
y est inventé, présenté sous le jour d’une
enfance maltraitée et sordide, d’une adolescence
violentée, qui lorgne du côté de L’assommoir
de Zola. Drôle de pratique comme un rejet de
la vraie enfance, comme le désir de se coltiner à
sa propre vie. Pourquoi pas ? L’idée vue de
la quatrième de couverture paraissait pour le moins séduisante.
Une forme de résistance personnelle non dénuée
d’humour qui donne un coup de pied salutaire dans
la normalité et la morosité ambiantes.
Malheureusement, il me semble que le roman atteint vite ses
limites, comme exécuté par les armes qu’il tend
à dénoncer. La caricature facile pointe le bout de
son nez, ainsi du week-end à la campagne et cette
opposition simpliste entre monde urbain et monde
rural. Et quand à la fin le texte sur onze pages
– sur un livre qui en compte 175 – est noirci
avant la mention "Delete", je trouve
le procédé sans attrait particulier, illustration
appuyée de l’effacement de soi-même. Peut-être
faut-il regarder tout cela avec légèreté et décalage,
mais alors oui j’avoue que j’ai rarement cette
attitude face aux livres.
C’est d’autant plus dommage qu'il
existe ici un talent d’écriture, mis en relief
par la narration de la double vie de l’auteur. Les
pages de cette autobiographie inventée sont rédigées
à l’opposé du style bref et direct, parfois même
trivial, du reste de l’ouvrage.
Déçu de n’avoir rien ressenti face à ce récit parfois
drôle et inspiré, mais le plus souvent plat et qui
ne rend pas attachants ses deux protagonistes
(volonté ou non de la part de JM Sens, je
l’ignore ?), je me suis promis d’aller
refaire un tour prochainement dans un autre opus de
cet auteur par ailleurs auteur-interprète, poète
et photographe. Histoire de pouvoir réviser ma
première impression….
Patrick
Sens & Tonka
99 rue du Faubourg-du-Temple
75010 Paris
www.senstonkaediteurs.com
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