Folle
place son lecteur dans une posture désobligeante -
voyeurisme, exaspération, attendrissement ou
agacement, la jolie Nelly Arcan ne
nous épargne guère ! Pourtant la jeune femme possède
un certain talent, sa plume est fraîche, spontanée,
dynamique.
Au
lieu de ponctuer son récit de citations de grands
auteurs ou autres, non, elle préfère se référer
à son grand-père, personnage particulièrement
sensé et dont les sages paroles tendent à sauver
le discours de la jeune femme de sa propre dérive.
Car Nelly Arcan dérange : il y a
dans Folle une exacerbation de la
provocation et de la grossièreté, un
jusqu'au-boutisme proche de l'overdose. Par contre
se contre-balance la sincérité d'avoir aimé un
homme, très fort, au point d'en devenir folle,
surtout depuis leur séparation. Cet amour, forcément,
est raconté en langage cru, ne nous épargnant
aucun détail de l'ambiance malsaine où elle et son
amant usaient de drogues et de pornographie pour
atteindre la jouissance, par exemple. La jeune femme
s'auto-détruit, se rabaisse à n'être qu'une
"pute" (cf sujet de son premier livre).
Dans
Folle Nelly Arcan va
finalement chercher à comprendre sa folie amoureuse
par cet homme, ce Français. Mais aussi elle va
s'attarder à son travail d'écriture, sur ses
sentiments de jalousie et du silence qui a étouffé
son couple. Très belle analyse, de cet point de vue
là, d'une liaison capotée, d'un amour naufragé.
Un livre qui prend la forme d'une lettre, d'un
testament avant de se donner la mort, pense-t-elle.
Avant d'avoir trente ans, comme convenu. Alors cette
lettre, qu'on se permet de lire sans qu'elle nous
soit adressée, attise amour et haine. Mais, paraît-il,
"le talent peut écœurer" écrit-elle.
Probablement. Et cela explique sans doute pourquoi
la lecture de Folle est si ambivalente.
Stéphanie
Verlingue
Date de
parution : août 2004
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