Simenon
- L’assassin
Folio
Policier - 2003
Alors que
l’on célèbre en l’année 2003 la naissance d’un
des plus célèbres écrivains contemporains, que connaît-on
réellement de la littérature de Georges Simenon ?
Car, si pour beaucoup de lecteurs, Simenon c’est
avant tout le commissaire Maigret, son oeuvre va bien
plus loin que les enquêtes pépère du plus célèbre
policer de la littérature policière francophone.
Presque aussi connu pour sa
prose que pour sa vie tumultueuse et romanesque,
Simenon a écrit tout au long de son existence plus de
400 romans avec une capacité à se renouveler assez
impressionnante mais avec malgré tout des thèmes de prédilection
et une capacité à observer les mœurs de son époque
et à les retranscrire dans ses romans avec une précision
qui ont fait la principale qualité de l’auteur.
L’assassin, sorti en 1937, s’avère, après lecture, être un
roman idéal pour parler de l’écriture et des thèmes
chers à Simenon tant il regroupe en un peu plus de 200
pages tout ce qui fit, ou presque, le style Simenon.
L’histoire, comme souvent, est
simple : Dans une petite ville de province, le
docteur Kupérus, médecin et notable, apprend par une
lettre anonyme que sa femme le trompe avec un homme, le
sieur Shutter, avocat respecté et envié, que fréquente
Kupérus régulièrement au cercle dont il font tous
deux partie. Décision prise, Kupérus décide de tuer
sa femme et son amant et de faire disparaître les
corps.
Le docteur, se sentant de plus
en plus seul, exige de sa bonne, Neel, qu’elle
devienne sa maîtresse. Alors va commencer tout un jeu
de séduction/répulsion entre les deux êtres, et
parallèlement, en ville la rumeur se fait de plus en
plus forte quant à l’implication de Kupérus dans la
mort de sa femme et de l’avocat.
En sociologue
averti et comme un témoin de son temps et des hommes,
Simenon nous parle, à travers ce roman noir, comme à
travers beaucoup d’autres, des difficultés des
rapports humains, du choc des rapports entre les classes
sociales, de la pression sociale et populaire dans les
provinces de l’entre-deux-guerres, des êtres en
rupture et des petites gens face à la bourgeoisie.
Bâti sur une
trame simple, dans un style clair, impersonnel et sans
fioriture, L’assassin, comme bon nombre de ses
romans, va à l’essentiel avec des mots simples, des
phrases courtes avec comme priorité le récit et avant
tout le récit. Et dans ce récit vous y trouverez, la
plupart du temps un personnage central, auquel le
lecteur peut s’identifier, et autour de ce personnage
quelques autres qui constitueront une sorte de groupe
social dans lequel se dérouleront les événements du récit.
Roman noir et
non policier, L’assassin se veut avant tout
comme un témoignage ou un regard sur une micro-société
(en l’occurrence, la ville où se déroule le drame)
qui se regarde vivre où chacun épie ou envie
l’autre, où la pression populaire est si forte
qu’elle finira finalement par l’emporter sur un
personnage reclus et isolé mais qui ne peut se résoudre
à quitter cette ville qui l’a condamné mais à
laquelle il se sent attaché.
L’assassin est un roman à la fois troublant et très prenant
par sa lecture, dans lequel on se plonge corps et âme
pour vivre aux côtés de personnages tourmentés et
fascinants comme seul Simenon sait les décrire.
Benoît
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