Attention, voici un écrivain à découvrir ! Mathieu
Belezi, qui nous livre une histoire implacable,
belle et cruelle, celle d’un enfant délaissé par
ses parents, envoyé chez son grand-père à la
campagne à l’aune de ses douze ans. Ce gamin
encombrant, parce que son père et sa mère se déchirent
et n’ont plus de temps à lui consacrer, est un
petit sauvage, écorché vif et blessé, et donc,
comme souvent dans ces cas là, cruel, d’une
cruauté qui lui fait déverser sa colère et sa
haine sur ce qui passe à sa portée (un poussin, un
rat d’eau, un copain un peu trop passif, une
poule, une grange…).
Cette enfance solitaire et dévastée est ici
magnifiquement retranscrite par Belezi. Sans
misérabilisme ni pathos, ni désir de plaire et/ou
de se complaire. Dans un style économe et
singulier, qui met d’autant en évidence l’âpreté
et la violence de cette histoire.
Le
petit Mathieu, malgré la tendresse de son
"Papé" (très belle scène que
cette nuit de Noël où l’enfant découvre un vélo !
dans un moment en suspension qui illumine un peu le
livre…), rumine ainsi ses rancœurs, ne pense
qu’à se venger, fait et se fait violence, parce
qu’il se sent abandonné, délaissé, seul… en
manque d’amour, tout simplement. Et derrière
cette violence, il y a aussi un instinct de vie, une
urgence, l’éveil aussi d’une sensualité et
d’une sexualité qui se fait aussi violence, une
manière au final courageuse d’affronter les
choses, de tenter d’oublier son chagrin, derrière
une sensibilité et une pudeur qu’on devine à
chaque page.
Magnifique portrait donc que celui de ce gamin
secret, torturé et souvent hargneux, qui perçoit
tout, y compris (surtout) ce qu’on lui cache. Et
qui apprend à grandir et à quitter cette enfance
qu’on lui a volé, vite vite, en réfrénant les
larmes qui montent malgré lui, et en pédalant à
toute allure sur son vélo. Pendant que le vent dénude
les arbres. Laissant derrière lui son « Papé »
qui n’est plus.
Voici donc un grand romancier à suivre, qui nous
parle très justement d’un enfant ultra-sensible
qui découvre trop vite les trahisons,
l’injustice, et le monde adulte. L’apprentissage
de la vie en somme.
Cathie
Maillot
|