Emmanuel
Adely - Mad about eh boy
Editions
Joëlle Losfeld/Collection Arcanes-2003
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Ce court texte
d’Emmanuel Adely, né à Paris en 1962, apparaît
comme une variation sur une chanson d’amour de Dinah
Washington : Mad about the boy.
D’ailleurs, il en reprend la structure. Les répétitions
périodiques peuvent être perçues comme des refrains,
qui entourent des couplets chargés de décrire l’évolution
de cette histoire d’amour, à peine ébauchée, et déjà
finie.
Une histoire ou une déclaration
d’amour, un hymne en tout cas, sorti des tripes par une
vieille femme en fin de vie , qui n’en attendait plus
grand chose. Vieille femme ou homme peut-être, car Emmanuel
Adely sème le trouble dans nos esprits par l’emploi
d’ adjectifs tantôt au masculin, tantôt au féminin.
Peu importe, le sentiment amoureux est universel et dépasse
largement le cadre de l’identité sexuelle.
C’est fait
de plein de petits détails, de petits riens qui ne sont
significatifs que pour les amoureux et souvent ridicules
pour les autres. D’abord, la rencontre bien sûr
inattendue, dos contre dos, avec ces deux mains inconnues
qui se touchent, prennent connaissance et
s’apprivoisent. Viennent ensuite tous ces petits moments
d’observation sous les fenêtres de l’aimé prénommé
Jean, d’attente d’ un coup de fil promis et passé à
heure fixe, de découverte du corps, du sourire, des
mains…. Enfin, le besoin physique de la présence de
Jean, et l’importance extrême prêtée aux objets
qu’il touche ou utilise qui prennent un caractère sacré,
presque des reliques. Tous ceux, toutes celles qui ont
connu l’amour au moins une fois dans leur vie
ressentiront forcément une totale empathie pour cette
amoureuse qui dorénavant se passe la chanson Mad about
the boy en boucle, la fredonnant, la dansant. Il
m’est à ce moment-là revenu en mémoire la scène du
film de Brigitte Rouan : Post coïtum
animal triste, où l’héroïne Diane abandonnée par
son jeune amant Emilio s’écoutait elle aussi ad
nauseam la chanson qui avait vu naître leur amour.
Le texte est
écrit sans ponctuation, sans majuscule comme un flot de
pensées, comme un cœur rempli d’amour qu’il
n’arrive plus à contenir et qu’il faut déverser.
Avec ce sixième livre, Emmanuel
Adely confirme son talent singulier et sa place dans
le cénacle des jeunes auteurs français, auprès
notamment de Christine Angot. On se souvient avec
bonheur de sa double quête identitaire : celle de sa
mère dans Jeanne, Jeanne, Jeanne et puis celle de
son père du côté de l’Egypte dans Fanfare. Il
y était souvent question d’angoisse, d’incertitude et
de fragilité. Tout comme dans Agar Agar, mettant
en scène les déchirements d’un jeune couple devant son
jeune enfant.
En une longue
litanie, obsessionnelle et lancinante, Emmanuel Adely
décrit avec brio et tendresse cet état de vide, de
manque et d’attente vaine lorsque l’être aimé est
parti. Il faudrait avoir une pierre à la place du cœur
pour ne pas vibrer à ce texte évident, beau
et émouvant.
Patrick
Edtions Joëlle Losfeld
4 rue Férou
75006 Paris
Tél : 01 56 81 04 13
Site personnel de l’auteur :
http://e.adely.free.fr
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