Palavas la Blanche. Derrière ce titre en forme de clin d’œil, derrière
le nom de cette cité balnéaire (Palavas-les-Flots)
se cache une sombre histoire, celle de la guerre
l’Algérie, avec ses combattants, ses militaires,
mais aussi ses civils, ceux qui ne demandent rien à
personne mais qui se retrouvent embarqués de force
à travers un conflit dans lequel ils semblent bien
perdus. C’est de ces gens-là que parle Christophe
Léon dans son nouveau roman avec une grande
sensibilité et un ton à la fois grave et décalé
qui en font récit simple et très touchant.
En 1962, Ray, une femme accompagnée de
ses trois enfants (Francine, Edmond et Jackie),
embarquent sur le Kairouan, un navire à destination
de Collioure. Ils quittent définitivement leur pays
et Alger pour partir s’installer à Palavas, dans
une location de vacances, en attendant mieux.
Mais cette famille là n’est pas une famille ordinaire. Séparés
de leur père (resté dans la clandestinité en Algérie),
ces trois enfants fuient leurs racines et comme tant
d’autres « pieds noirs », ils
regagnent, à contre cœur un pays, la France, qu’
ils mettront beaucoup de temps à accepter comme le
leur.
Déracinés, victimes de racisme à leur
arrivée en France, cette famille vit une drôle
d’aventure, avec la folie qui semble roder à
chaque page. Car de folie, il en est bien question
ici. Tout d’abord avec Edmond, le plus âgé des
deux garçons, handicapé mental et qui ponctue la
plupart de ses phrases par un perpétuel Oh !
Oh ! Oh ! Oh ! Et puis il y a
Francine, l’adolescente paumée qui se cherche
entre l’enfance et l’âge adulte. Et enfin
Frankie, le plus jeune, l’enfant qui ne parle
plus, traumatisé depuis le mitraillage d’une
terrasse de bar et qui vit, à travers son mutisme,
une drôle de relation avec son père absent, dans
une sorte de dialogue imaginaire. Et qu’il est
touchant ce petit garçon qui porte en permanence
avec une lui une petite caravelle dans laquelle il
dissimule une photo de son père.
Et au milieu de ces mômes quelque peu perturbés et d’un
étrange grand-père, se débat, tant bien que mal,
Ray, la mère, entre démarches administratives et dépression.
Dans un style dépouillé et avec une
narration vive faisant la part belle à des
personnages émouvants, Christophe Léon dresse
un portrait touchant et plein de tendresse d’une
famille égarée dans une société tourmentée.
Il nous rappelle, à travers ce récit, l’histoire de ces
français d’Algérie rapatriés, et plus généralement,
présente, sous un angle particulier et terriblement
humain, le conflit et l’horreur que fut la Guerre
d’Algérie.
Après
Tu
t’appelles Amandine Khedda paru
en 2002, Palavas la Blanche est son deuxième
roman publié aux Éditions du Rouergue.
Benoît
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