Après
le braquage d’un fourgon blindé qui tourne mal,
José, Farouk et Réza trois jeunes apprentis
bandits se terrent au fond d’une planque préalablement
repérée dont la surface exiguë et anxiogène
sert de titre au premier film de Barthélémy
Grossmann, par ailleurs interprète principal.
Autodidacte, ayant suivi le cours Florent pour
devenir comédien, le jeune Suisse nourri aux
biographies de Orson Welles, Charlie Chaplin, Bill
Gates ou encore Mike Tyson qui ont tous en commun
cette farouche détermination à s’en sortir et
à réussir, s’est rapidement senti attiré par
l’écriture de pièces de théâtre, puis d’un
court-métrage Tôt ou tard, dont un
extrait est repris dans 13 m².
Né
d’une balade dans Montreuil qui se singularise
par ses nombreux passages désaffectés reliant
les quartiers, tissant une structure labyrinthique
idéale pour toutes les cachettes possibles, 13
m², en dépit de sa localisation et de la
typologie de ses personnages, n’est pas réellement
un film de plus sur la banlieue et tous les clichés
habituels qu’elle véhicule. L’enfermement
sert ici de catalyseur à révéler au grand jour
la personnalité de chaque membre du trio et le
rapport de chacun avec la société de
consommation dont ils sont les victimes directes
et inconscientes, pensant s’en affranchir grâce
aux gains mirobolants offerts par le braquage.
L’argent qui pourrait bien faire le bonheur,
mais qui est pour l’heure inutilisable et
devient juste le prétexte très concret à rêver
tout haut d’horizons lointains et de jours
meilleurs. Un pactole qui, au lieu de se révéler
une échappatoire à la tristesse quotidienne, précipitera
les trois personnages vers la tragédie prévisible,
conséquence de leur inadéquation à la société
qui les entoure et les lamine.
C’est
donc un sujet ambitieux, à la fois sociétal et
politique, auquel Barthélémy Grossmann
s’est attaqué avec une louable énergie, sans
doute épuisée à faire face à l’absence de
moyens et à l ‘ampleur des missions endossées
par le jeune cinéaste qui est également crédité
comme scénariste et producteur. Mais on ne le répétera
jamais assez : les meilleures intentions ne
garantissent jamais la qualité d’un film.
Certes,
l’insuffisance des moyens saute ici aux yeux
mais son contournement oblige à des astuces qui
peuvent donner au final de vrais moments de cinéma :
ainsi plutôt que filmer le braquage – séquence
forcément spectaculaire qui produirait à coup sûr
ses effets – Barthélémy Grossmann opte
pour un traitement hors champ : la bande-son
du méfait illustre l’enfilade des passages lépreux
et taggués qui aboutissent à la planque. Hélas,
cette planque annoncée comme le lieu central du développement
de l’histoire est très mal utilisée par le réalisateur
qui ne rate aucune occasion, même futile sinon
invraisemblable, de s’en extraire comme s’il
ne savait quoi filmer dans ce trou à rats sordide
et fort peu cinégénique.
La
faiblesse manifeste du scénario qui entache toute
la cohérence de 13 m², balançant sans
trancher entre banal film de gangster et étude de
mœurs , suscite dès lors peu d’intérêt auprès
du spectateur que l’ennui finit par envahir. Et
malgré sa juste perception des motifs de
dysfonctionnement de la société, Barthélémy
Grossmann n’offre rien de très novateur.
Champion
de la débrouillardise, le jeune cinéaste est
sans conteste volontaire, énergique et plein de
ressources. On sent bien chez lui un regard lucide
et sans concessions porté sur le monde et un
terreau qui ne demande qu’à s’épanouir, si
tant est qu’on le débarrasse des mauvaises
herbes.
Patrick
Braganti
Policier
français – 1 h 24 – Sortie le 20 Juin 2007
Avec
Barthélémy Grossmann, Lucien Jean-Baptiste,
Youssef Hajdi
Plus+
www.13m2-lefilm.com
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