Il
y a une certaine similitude entre l’appartement
de Franck Meyer et le paysage qu’il peut
contempler depuis sa fenêtre. En effet, le
capharnaüm à l’intérieur : restes de
repas, cadavres de bouteilles, cendrier plein, vêtements
en vrac est parfaitement raccord à l’ extérieur
mis sans dessus dessous par la tempête qui sévit
depuis quelques jours sur cette région côtière,
quelque part en Normandie.
Technicien
en informatique et intérimaire patenté, Franck
est extirpé d’un sommeil, que l’on devine
alcoolisé, par l’appel d’une agence qui
l’envoie prêter main forte à un responsable de
supermarché, très énervé par la panne de son
système l’obligeant à fermer le magasin et
donc à faire une croix sur son chiffre
d’affaires.
Hébergé
dans un petit hôtel déserté à cause de la météo
exécrable et qui se transforme chaque soir en bar
bruyant, Franck Meyer comprend très vite que le
directeur n’est pas spécialement propre derrière
les oreilles, se livrant avec un comparse, parti
en mer que Franck remplace justement, à un
fructueux détournement de l’argent des caisses.
Le désinvolte et velléitaire informaticien se
laisse embringuer dans les magouilles du directeur
et dans les plans foireux des petits truands
locaux qui trouvent refuge chez Frédérique, la
jolie et séductrice gérante de l’hôtel.
Pour
son premier film, le scénariste Stéphane
Allagnon met en lumière un anti-héros :
un mec nonchalant, looser sur les bords, au look
gentiment ringard. La parfaite figure du paumé
qui enchaîne périodes de boulot précaire et de
chômage et tente de survivre, pour lequel le réalisateur
ne nous donne aucun background. Même si Vent
mauvais opère comme un film noir, il lorgne
aussi vers le western : un homme solitaire débarquant
dans une petite ville avec le bar de l’hôtel
comme saloon, la salle des coffres du supermarché
comme banque, la gérante comme jolie pépée et
garce putative.
Bien
sûr, le mot Vent est à double sens :
d’abord le phénomène météorologique qui
balaie tout sur son passage et produit ses effets
d’énervement et d’excitation sur les
individus, ensuite la notion de destin telle
qu’on peut l’appréhender dans une expression
comme Bon vent. En l’occurrence, il est ici plutôt
mauvais, augurant d’une issue noire et pas forcément
heureuse. En effet, Vent mauvais réserve
son lot de rebondissements en tissant des liens de
plus en plus subtils et inattendus entre les différents
personnages.
Le
belge Jonathan Zaccaï, acteur discret,
instille toute son étrangeté à son personnage. Aude
Atika, sorte de Béatrice Dalle dégraissée
et nettement plus classe, apporte sa touche
sensuelle à l’histoire. En directeur véreux et
magouilleur, Bernard Le Coq est assez
saisissant : le cheveu long dans la nuque,
les cravates voyantes, le regard à la fois
incisif et désabusé, il donne à son rôle
l’exacte dimension de ringardise et de petitesse
avide.
Polar
mâtiné de comédie sociale, Vent mauvais
convainc par l’épaisseur de ses personnages et
l’absence totale de jugement porté sur ceux-là.
Si la tranquillité est la base des affaires,
ainsi que l’affiche du film le mentionne, on
s’apercevra que vouloir la chahuter peut ouvrir
d’autres perspectives que celles envisagées.
Patrick
Braganti
Thriller
français – 1 h 30 – Sortie le 13 Juin 2007
Avec
Jonathan Zaccaï, Aude Atika, Bernard Le Coq
Plus+
www.ventmauvais-lefilm.com
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