Avec
un titre à coucher dehors, Pablo Krantz réussit le
tour de force d'imposer son "provocant"
recueil de nouvelles avec malice. Point ne faut d'être
racoleur, il faut également assurer les arrières.
Là Pablo Krantz, jeune argentin d'une trentaine
d'années vivant en France depuis 2002, a su
retrousser ses manches, a écrit ses textes en français
(chapeau !) et peut s'enorgueillir d'être culotté,
drôle, original et bon écrivain ! Bah oui, ce
jeune homme a du style, un humour bien mordant et ne
s'embarrasse pas d'écriture pompeuse et de
crocs-en-jambe déplacés pour qu'on le salue.
L'imagination, associée à une âme d'enfant, est
certainement l'engrais le plus puissant que la
science botanique puisse concevoir. (Là, c'est le
site Evene
qui le dit, et je suis de son avis !) Car dans la
plupart des nouvelles, Pablo Krantz a mis en scène
un jeune garçon ou un adolescent, bien souvent dans
les rues de Buenos Aires, qui suit son bonhomme de
chemin, nez au vent et les mains dans les poches, séduit
et étourdi par quelques petites beautés (au
puissant parfum de tentation), mais bien souvent
trompé, éconduit ou abruti par ses fantasmes, et
sans l'emprise d'hallucinogènes !
A noter aussi : les titres des nouvelles sont
particulièrement poétiques et exagérés, genre
"histoire d'amour sur fond de fourmis",
"la chanson de la pluie argentée de poisson
frit", "cycles migratoires" ou
"mon père était un officier nazi". Dans
cette dernière, l'ami d'un écrivain lui suggère
de se créer une image sulfureuse pour créer la
sensation, il n'hésite pas à nommer quelques
grands noms pour argumenter sa position... Les
nouvelles dans l'ensemble sont très courtes, à
part deux ou trois exceptions. Le recueil aurait pu
être "excellent", s'il n'avait fallu
sacrifier à la sacro-sainte règle du recueil de
nouvelles où la qualité n'est jamais indéfectible,
et personnellement j'ai trouvé les derniers textes
moins jubilatoires qu'au commencement. Mais ce n'est
pas grave du tout, ça peut se mélanger et ça ne
change en rien mon avis déclamatoire sur cette
lecture ! "Car, enfin, je crois que vous êtes
déjà en âge de savoir que, dans ce bas monde,
tout est dans la manière, les faits importent
peu."
Stéphanie
Verlingue
Date de
parution : 6 octobre 2005
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