Réunis
par l’éditrice Delphine Montalant, les
travaux de Roseline Delacour et Jean-Philippe
Blondel présentent des similitudes dans la
description resserrée et efficace des caractères,
ainsi que dans la peinture au vitriol acidulé des mœurs
modernes.
Pour son premier roman, Roseline Delacour,
par ailleurs peintre et photographe, a choisi le
recueil de nouvelles. Elles sont au nombre de sept
et mettent en scène des personnages meurtris, en
proie aux affres de l’amour, aux questionnements
existentiels et au doute.
Il
y est souvent question d’expositions, de musées,
sans doute motivé par la profession de l’auteur.
Et plus précisément de la représentation du vide
dans l’art. Ce qui est bien sûr hautement
symbolique et lourd de sens.
Mais
les femmes de ce livre ont aussi en commun un goût
immodéré pour les étoiles et les cieux
insondables qu’elles aiment explorer à travers
des télescopes ou lunettes sophistiqués. Là aussi
on peut y noter la symbolisation d’ étudier
l’immensité pour connaître son moi intérieur et
enfoui.
Le texte de Roseline Delacour est éminemment
inscrit dans la réalité, notamment à travers la
nouvelle intitulée Un ange qui nous fait
partager la dérive de Paul jusqu’à sa
clochardisation et son errance à travers les
refuges et les dispensaires, s’achevant par la
renaissance grâce à la rencontre de l’ Amour.
L’amour
avec un grand A est aussi le dénominateur commun
des sept histoires, vu comme une rédemption, une
croyance et l’ ouverture de possibles.
Malgré
la peinture d’un monde froid et impersonnel, Loin
de quelque part reste imprégné d’optimisme.
Nullement résignée, l’auteur y croit encore à
travers ses personnages.
Nous avons affaire à un style d’ écriture sec et
dépouillé. Les phrases sont brèves, souvent réduites
à un sujet, un verbe et peu d’adjectifs ou
d’adverbes. L’emploi continu du présent de
l’indicatif ancre la narration dans la réalité
palpable. A noter également que chaque phrase est
suivie d’un retour à la ligne, découpant le
livre en une succession de faits, d’actions ou d
‘impressions. Une écriture extrêmement découpée
qui fait du coup à penser à celle d’un
story-board.
D’aucuns
trouveront ce recueil très mode, très tendance.
Dans l’air du temps, quoi. Nous ne sommes pas ici
dans une littérature qui privilégierait le style
lourd, la formule ou l’exercice de style. La
simplicité apparente, d’ailleurs souvent le fruit
d’un travail assidu d’ épure et d’élagage,
n’exclut en rien le talent.
Au-delà de cette appréciation forcément
subjective du travail d’un écrivain, se livrant
à l’exercice périlleux du premier ouvrage, on
garde durablement en mémoire les histoires fortes
et émouvantes que l’auteur nous fait partager
avec lucidité et tendresse.
Patrick
|