«
On nous dit que les plantes sont des créatures périssables,
dépourvues d’âme, et que seul l’homme est
immortel, etc…, mais c’est là un sujet, je
pense, dont nous ne savons presque rien. Quoi
qu’il en soit, ce palmier là était
impressionnant au-delà des mots, et il m’a dit
des choses plus importantes que
je n’en ai jamais entendu d’un prêtre de
l’espèce humaine»
Bon voilà pour le factuel John Muir est le
grand-père des écologistes américains inventeur
des parcs naturels, sans lui entre autre plus de séquoias
géants (vous voyez le Séquoia vertigineux de Hitch),
un grand naturaliste herboriste promeneur, un grand
bonhomme tout court, et aussi un écrivain, et oui
un écrivain ! On le classera par commodité dans la
case écrivains voyageurs. Là où Nicolas
Bouvier descend l’inde en topolino poussive
lui descend les Etats Unis ... à pied …
Merveilleux voyage : des prairies au bayou poussant
jusqu'à Cuba au milieu des décombres d’une
guerre de sécession fini depuis peu. Voyage périlleux
; il faut faire avec les hommes, des bandits
sudistes crasseux défroqués, de fort peu aimables
esclaves échappés, il faut faire avec la nature,
avec les animaux, il y a des pages très drôles sur
le droit de l’alligator et sur l’antipathie
discriminatoire qui le poursuit inlassablement «
Honorables représentants des grands sauriens..
Puissiez-vous profiter longtemps de vos joncs, de
vos nénuphars, et vous offrir de temps en temps une
bonne bouchée d’homme terrorisé en guise de
friandise ! »
Si Muir est un grand naturaliste qui note et
classifie tout ce qui est à sa portée de semelles,
c’est aussi un grand panthéiste (derrière un
vieux fond chrétien) du petit Spinoza à goût
hindou dans la grande tradition anglo-saxonne, moins
barbu que Whitman (barbu quand même) moins
emberlificoté que John Cowper Powys … mais il y a
de ça, une vision cosmique qui englobe l’univers
(mais avec modestie) où dieu est dans tout les êtres,
les éléments, la nature, les objets… Il y a une
conscience dans l’apparemment inanimé, il faut
d’ailleurs étendre les droits du vivant à
l’inanimé !
Les dernières pages, sa découverte de la
Californie, des montagnes de la Sierra Nevada sont
d’une lumière et d’une douceur inestimable …
D’ailleurs
j’ai toujours pensé cela moi aussi, je le
penserais toujours et quand je ne serais plus rien,
poussière ou cendres, - atomes de cendres disséminées
au vent – quand je ne spéculerais plus rien
depuis longtemps je ne serais plus que ça : un élément
de la nature et rien que ça, je le suis déjà :«
On ne peut pas se sentir à l’écart : montagnes,
plaine et ciel irradient la beauté que l’on
ressent. On baigne dans ce rayonnement spirituel ;
on s’y tourne en tous sens comme lorsqu’on se réchauffe
à un feu de camp. On perd bientôt la conscience
d’exister de façon autonome, on se fond dans le
paysage et on devient une partie, un élément de la
nature… »
Philippe
Louche
Date de
parution : 5
octobre 2006
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