Après Moby Dick, Bartleby est sans doute
le texte le plus connu de Melville, ne
serait-ce qu’en raison de l’encre qu’a fait
couler le fameux “I would prefer not to”
de Bartleby, le “héros” éponyme de la
nouvelle. Ici Jérôme Vidal, à la différence
d’autres traducteurs, choisit de le rendre par
“j’aimerais mieux pas”, rejetant le classique
et bien plus ampoulé “ je préférerais ne
pas”. Cette phrase, répétée à nombreuses
reprises, qu’oppose Bartleby aux demandes qu’on
lui fait, est l’une des rares qu’il profère. Ce
“j’aimerais mieux pas” n’est pas, comme
certains l’ont dit, l’affirmation d’une révolte,
mais celle d’une incapacité foncière à vouloir ;
Bartleby en ce sens est l’incarnation de la mélancolie,
mélancolie qui parcourt l’œuvre de Melville
que ce soit ici, dans les réflexions du narrateur
de Moby Dick, ou encore dans les esquisses
qui composent Les Îles enchantées.
Incarnation bien désincarnée étant donnés le
physique et le régime alimentaire du personnage,
composé de biscuits au gingembre et d’un peu de
fromage. Le parti pris de l’illustrateur de ne pas
représenter Bartleby est à cet égard fort
judicieux. De même, le travail graphique tout en
nuances de gris n’est-il pas sans rappeler la
grisaille de l’univers décrit par le texte. Les
illustrations de Jean-Claude Götting, par
leurs cadrages “photographiques”, possèdent une
force expressive qui ne dépare pas avec le texte
lui-même. Nous ne pouvons donc que saluer cette réussite
d’une petite maison d’édition qui a aussi fait
paraître une traduction, du même Jérôme Vidal,
de Billy Budd, dernier roman de Melville.
Seul petit reproche : il n’est pas toujours aisé
de localiser les notes, en raison de quelques
erreurs dans la pagination et de l’absence
d’appel de notes.
Dominique
Fagnot
Date de
parution : octobre 2004
On trouvera aussi sur leur site :
- La Véranda
-
L’Homme
au paratonnerre
deux courtes nouvelles
disponibles en ligne.
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