Christian
Oster - loin d'Odile
les
éditions de minuit - 1996
Christian Oster ne connaît pas
ma mère. Elle, de son côté, n’a sans doute jamais
lu une ligne d’un de ses romans, ni même,
d’ailleurs, entendu parler de cet auteur. Ce qui est
un tort, d’un part parce qu’elle porte le prénom
d'une mouche, personnage important de ce roman, et d’autre
part parce que Christian Oster écrit de bons livres. Et
Loin d’Odile en est un assurément.
Christian Oster publie avec cette nouvelle histoire son
huitième roman après d’autres aux titres tous aussi
énigmatiques que ce dernier : Volley-ball, Paul
au téléphone ou encore mon grand appartement.
Lucien, le narrateur de Loin d'Odile,
a quarante-cinq ans. Il est au chômage et vit seul dans
un petit appartement parisien. Depuis peu il tient son
journal intime. Voilà trois ans, il rompait avec son
amie Odile. Novembre touche à sa fin, quand une simple
mouche, rescapée de l'été, vient élire domicile chez
lui. A l'inattendue visiteuse, qui va désormais
l'occuper à plein temps, il attribue le prénom de
l'ancienne amie, Odile. Voilà en gros la trame de cette
histoire au demeurant simple mais qui, finalement, se révélera
plus compliquée qu’il n’y parait.
En plus d’être un auteur typiquement
"Minuit" comme Christian Gailly
ou Jean Echenoz, c’est-à-dire un écrivain au
style incroyablement précis et à l’écriture
minutieuse voir, micro-chirurgicale, Christian Oster est
aussi un écrivain doté d’un humour incroyable et
d’un sens de l’absurde et de la dérision tels
qu’il pourrait faire penser, dans les situations
qu’il met en scène à un auteur tel que Beckett
(tiens, lui aussi chez Minuit). Comment ne pas rire intérieurement
quand on assiste aux tête à tête absurdes entre la
mouche et le narrateur, comment ne pas sourire quand ce
dernier tente d’échafauder des stratagèmes tordus
afin de se débarrasser de sa locataire dont il ne peut
se défaire. Le tout est raconté avec un sens de l’ironie
et du second degré sans pareil, notamment dans les
descriptions des personnages et des lieux que fréquente
le narrateur.
Christian Oster est un séducteur, par ses mots, par ses
tournures de phrases, par les situations qu’il décrit,
il nous rend ses livres sympathiques et de ce fait,
renvoie de lui-même l’image de quelqu’un avec qui
on a envie de partager un moment juste pour vérifier si
l’écrivain dégage autant de bonhomie que ses
personnages.
Benoît
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