Pierre
Siniac : Portrait
(1928-2002)
Hommage à un grand nom de la littérature policière décédé
le 11 avril dernier à l'âge de 74 ans.
Né
le 15 juin 1928 à Paris, après avoir exercé
divers métiers, Pierre Siniac publie son premier roman
en 1958, Illégitime
défense,
aux éditions de L'Arabesque.
Suivront
Bonjour
Cauchemar
(1959)
et Monsieur
Cauchemar
(1960),
qui s'amusent déjà avec les règles du genre puisque
trois dénouements différents sont laissés à l'appréciation
du lecteur. Les Morfalous en 1968 est un bon exemple de l'humour si particulier de
Pierre Siniac : le roman raconte les tribulations
de trois malfrats, combattants de la dernière guerre
qui passent pour des héros après avoir braqué une
banque, empêchant ainsi les Allemands de faire main
basse sur le contenu des coffres - en 1984, Henri
Verneuil avait adapté ce livre à l'écran.
En
1971, Pierre Siniac crée son tandem d'enfer :
Luj'Inferman et la Cloducque - "âge et sexe indéterminés...
trogne épaisse, rosâtre, petits yeux verts cruels,
stupides et méchants. Cheveux clairsemés, blonds,
blancs, roux. Lèvres rouges très épaisses. Nez très
fort, ignoble, couvert de cloques violacées, écarlates,
bleuâtres..." Ses deux monstres vont déployer
toute leur verve ravageuse dans une série qui comprend Luj'Inferman et la Cloducque
(1971),
Les
401 Coups de Luj'Inferman
(1972),
Les Cinq Milliards de Luj'Inferman (1973) et Luj'Inferman chez les poulets (1980).
C'est
en 1980 que Pierre Siniac remporte le Grand Prix de littérature
policière pour trois livres simultanément, ce qui est
un cas unique : Aime
le Maudit
(Engrenage)
et deux recueils de nouvelles : L'Unijambiste de la côte 284 et Reflets changeants sur mare de sang
("Série
noire"). Siniac n'a cessé de publier chez de très
nombreux éditeurs, en particulier au Masque, Des
amis dans la police
(1989), et chez Rivages Ferdinaud Céline (1997) ou Le Mystère de la sombre zone
(1999).
Tout
récemment, dans l'anthologie de Jean-Baptiste Baronian,
Noir Scénar, Pierre Siniac était revenu dans sa
nouvelle Sales sobscurs sur un de ses thèmes favoris, le cinéma, mettant en scène
un figurant inconnu qui, malgré une carrière pour le
moins discrète, parvient à susciter la jalousie d'un
de ses confrères encore moins célèbre que lui mais
plus vindicatif. Il avait remis il y a quelques mois aux
éditions Rivages le manuscrit de son dernier roman,
qu'il voulait intituler La
Corvée de soupe
et
qui devrait paraître prochainement sous le titre Le Vol du hanneton dans la ville détruite.
Dès
le premier roman achevé, j'ai compris que je n'étais
pas prêt de lâcher cet écrivain. Doté d'un style
flamboyant et désopilant qui pourrait rappeler Alphonse
Boudard ou René Fallet, il est à la fois cynique et
plein d'humour. La prose de Siniac nous emmène à
chaque fois dans des aventures délirantes durant
lesquelles ont côtoie les pires personnages, plus
rebutants les uns que les autres mais totalement
hilarants.
Un vrai régal !
Benoît
Richard
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